Le témoignage glaçant d'une infirmière de retour de Gaza | 24•60

c'est compliqué franchement c'est compliqué de bosser aux urgences il y a du sang partout il manque de matériel on a fait deux intubations en moins d'une heure un qu'on a mis en réut qu'on a perdu et à un moment donné faut faire des choix l'hôpital est surchargé c'est compliqué franchement c'est compliqué j'ai pas les mot j'ai pas les mots de cette souffrance j'ai pas les mot elle n'a pas les mots de cette souffrance Mar c'est ère française de 37 ans qui a enregistré cette vidéo alors qu'elle se trouvait à l'Hôpital européen dans la ville de Hanis au mois de février dernier alors je me suis entretenue un peu plus tôt avec elle aujourd'hui pour parler justement de ce qu'elle a vu et vécu lors de ces 16 jours dans la bande de Gaza et un témoignage vraiment touchant et percutant j'ai voulu savoir pourquoi elle il était important pour elle de témoigner alors quelle hâte d'y retourner dans la bande de Gaza on l'écoute madame marieille bonsoir et bienvenue à 2460 bonsoir vous avez passé 5 jours dans la bande de Gaza dans un hôpital à newes vous avez vu de très près ce qui s'y passait je demandais ce soir parce que certainement un témoignage difficile et des des souvenirs très difficiles pourquoi c'est important pour vous de nous parler de témoigner ce que vous avez vu alors il faut savoir que tr 3 jours avant notre retour euh j'ai su que des journalistes nous attendraient à l'aéroport qu'ils connaissaient notre date de retour avec le vol et cetera et je me suis mise en colère j'ai appelé l'ONG parce que nous étions partis de manière très discrète nous étions la première délégation française médicale à partir et j'étais très en colère ça faisait déjà plus d'une dizaine de jours que nous étions là j'ai appelé l'ONG et je je et j'étais j'ai été très égoïste euh moi je moi je je euh je travaille je suis à mon compte c'est dangereux de parler de nous qu'est-ce que vous faites et ils m'ont dit t'inquiète pas Iman on fera ce qu'il faut pour vous protéger et quand je suis revenue dans le service et que je l'ai dit aux collègues Palestiniens locaux je leur ai dit mais vous vous rendez compte des journalistes veulent venir nous demander et cetera c'est n'importe quoi ils étaient euh presque euh en colère de ma réponse il me dis tu te rends compte personne ne ne peut venir voir ce que nous vivons les seules images qui partent sont les nôtres mais ta mission tu l'as rempl avec brio et merci d'être là mais ta mission continuera à ton retour et c'est eux qui m'ont fait prendre conscience que le monde aurait besoin de nos témoignages et de savoir ce qui s'y passe je n'ai à aucun moment imaginé que on me demanderait qu'est-ce que tu as vu qu'est-ce que tu as filmé est-ce que tu as pris des photos parce que je n'en ai pas prise vraiment je m'attendais pas à c'est très candide de ma part mais je m'attendais vraiment pas à témoigner donc c'est à leur demande que je j'essaie de je témoigne juste de ce que j'ai vu et ce que j'ai et dans cette perspective vous êtes en contact régulier avec vos vos collègues Palestiniens dans la bande de Gaza euh comme vous avez vu la situation il y a déjà 2 mois 3 mois euh ce qui se passe maintenant comment le décrireiez-vous écoutez j'ai des collègues qui sont partis en mission euh qui on ont pris le relais de l'ONG avec laquelle j'étais et qui me disent que ce serait pire qu'est-ce qui peut être pire que ce que j'ai laissé moi déjà nous nous sommes rentrés le 6 février ma délégation en tout cas nous sommes rentrés le 6 février et c'était déjà pire qu'est-ce qui peut être pire que ce que j'ai laissé j'ai laissé derrière moi un carnage un bain de sang une une tuerie de masse une boucherie qu'est-ce qui peut être pire que ça la famine les morts termie c'était mon dernier patient le le dernier patient à 2h30 du matin nous avons pris la route à 8h était un bébé de 48h qui est mort d'hypothermie donc qu'est-ce qui peut être pire que que tout ça je ne sais pas en tout cas ce qui s'y passé est très très grave et pour répondre à votre question initiale les médecins et infirmiers Palestiniens se disent psychologiquement brisé c'est l'un des derniers messages qui m'a heurté que j'ai reçu ces dernières semaines euh nous sommes psychologiquement brisés brisé et certainement privé d'un soutien parce qu'ils ont aucune ressource ils ont pas ce qu'il faut pour l'anesthésie ils ont pas ce qu'il faut pour soigner alors il faut surtout se dire qu'ils n'ont aucun soutien psychiatrique ou psychologique parce qu'il est très difficile de soutenir quelqu'un psychoaffectivement quand vous-même vous êtes en deuil et il faut savoir que 100 % des personnes que j'ai rencontré et j'ai rencontré des milliers de personnes juste dans l'enceinte de l'hôpital où j'ai vécu pendant 15 jours il il y a 30000 personnes environ qui y vivent donc j'ai rencontré des milliers de Palestiniens locaux 100 % sont en deuil ils ont au minimum perdu un membre de leur famille en tout cas dans tous les cas ils ne vivent plus dans leur logement ils n'ont plus de voiture plus de vie professionnelle plus de vie sociale donc ils n'ont personne à qui extérioriser ou se plaindre donc tout le monde est son deuil ça c'est une euh certitude les les le le côté psychologique est la et le premier dommage et puis ensuite effectivement il y a ce que vous décrivez le manque d'anesthésie le manque d'entalgique le manque de morphinique c'est horrible de devoir faire des choix et le fait d'être étrangère euh ils ont essayé de peut-être me demander mon avis plusieurs fois comme c'était un peu il savent ce qu'ils peuvent faire ou quelles sont leurs limites mais c'était aussi peut-être pour un peu cautionner ce qu'ils étaient en train de faire parce qu'il eux-mêmes savent que la médecine de guerre qu'il pratique est une médecine inhumaine mais ils n'ont pas le choix il va sauver des vies bien évidemment et les 30000 personnes qui vivent dans l'enceinte autour de l'hôpital quand on sait que les hôpitaux ont été la cible aussi des forces israéliennes sous prétexte dit-on du côté israélien que le Hamas s'y cache et se sert de de cette population comme bouclier humain qu'est-ce que ça vous inspire écoutez ce que je réponds à cela c'est que j'étais dans un hôpital d'accord où il y avait 30000 personnes environ 17000 enfants dans cet hôpital ce que je sais c'est que ces enfants n'ont aucun jeu d'accord ils passent leur journée à se chamailler secourir après voilà je pense et ce n'est pas de la la pure naïveté de ma part je pense que s'il y avait eu des cachettes dans l'hôpital croyez-moi que les 17000 enfants qui sont là les auraient trouvé et nous les aurit montré h euh ils allaient jusqu'à ouvrir les portes du bloc opératoire alors s'il y avait des portes qui cachaient des tunnels je pense que ces enfants qui joue qui cherch les moindres rins où se réfugié les auraient trouvé donc je je n'en ai pas vu moi euh on me pose souvent la question de savoir si j'ai soigné des combattants du Hamas euh moi ce que je réponds c'est que alors déjà je je m'en fiche pard excusez-moi de parler très naturellement quand bien même j'en aurais soigné si un blessé arrive d'abord je vois ce que je peux faire avec mes compét savoir quels sont ces conviction mais cependant je tiens à préciser que pendant les 15 jours où j'étais là en tout cas de toutes les personnes que j'ai eu à soigner euh je n'ai vu personne qui s'est présenté en tant que tel ou on a cherché à avoir un passe droit ou un laisser passer pour quelqu'un qui serait du gouvernement palestinien ou du Hamas je ne l'ai jamais eu et pourtant je suis la seule de ma délégation à avoir travaillé aux urgences 7 jours sur 7 de du lever du soleil au à jusque minuit parfois voire plus donc ça je je la teste je n'ai jamais vu quelqu'un qui s'est présenté en tant que tel ça c'est une certitude que je viens vous donner aujourd'hui des centaines de travailleurs humanitaires et donc évidemment du personnel médical des centaines ont été tués et ces jours derniers la BBC donc la le réseau public britannique a publié des photo c'est du personnel médical qui aurait été frappé humilié par l'armée israélienne vous avez eu écho de cette histoire là alors écoutez quand nous sommes arrivés à l'hôpital nous avons rencontré le directeur de l'hôpital et puis dans les les premiers jours je crois que ça faisait 3 4 jours que nous étions là il est parti il est parti j'ai demandé après lui et je dis où est-ce qu'il est parti personne ne savait vraiment où est-ce qu'il était parti j'ai demandé pourquoi et en fait on m'expliquait que il y avait eu des otages libérés et ces otages raconte qu'ils ont vu le directeur de l'hôpital alshifa euh docteur Mohammed qui c'est très choquant serait je dis bien serait voilà parce que je l'ai pas vu euh serait attaché par le cou il aurait les jambes et les bras brisés il est attaché par le cou relié à une chaîne en plein air qu'il serait battu bien sûr quotidiennement et quand on lui amène à manger de toute façon il a les quatre membres brisés on l'oblige à manger directement dans sa gamelle avec la bouche mais avant cela on fait d'abord monter les membres de son équipe pour qu'il le voit quand il a eu écho de celavid éidemment il il est parti il s'est caché et ces deux médecins que j'ai moi-même rencontré qui ont été libérés m'ont raconté leur calvaire et effectivement ils m'ont raconté ce type de scène d'humiliation j'ai été témoin de ces deux médecins qui racontent ce qu'ils ont vécu dans les jaules israéliennes je dois le dire il le raconte euh un un un un pédiatre a été libéré juste avant notre retour docteur Saïd Marouf et docteur Saïd Marouf il il est donc pédiatre il pleurait déjà parce qu'il avait encore des douleurs physiques de ce qu'il avait vécu pendant 45 jours il pleurait également parce qu'il n'avait aucune nouvelle de sa famille il ne savait pas comment les joindre il ne savait pas s'ils étaient vivants donc c'était très difficile de d'absorber sa peine c'était difficile et même pour vous d'absorber tout ça et malgré tout ça vous voulez y retourner vous savez euh mon collègue a eu des propos nous avons été reçu en audition à l'Assemblée nationale et mon collègue a tenu des propos que je partage totalement il a dit que c'était un privilège euh d'avoir servi notre pays la France parmi euh euh des Gazaouis les Palestiniens et qu' avait euh jamais été aussi bien ilétait il ne s'était jamais senti aussi bien qu'à Gaza sous les bombes et ses propos ont un petit peu interpeller certaines personnes qui m'en je veux dire aujourd'hui qu'effectivement j'ai hâte d'y retourner parce que c'est un peuple qui m'a enseigné une force incroyable leur résilience m'a profondément saisie et c'est presque une addiction de retourner auprès de ces personnes que vraiment je n'ai jamais rencontré des humains comme eux comme je dis j'ai découvert l'humanité auprès des Gazaoui vraiment je je je depuis quelques temps je remettais en doute le choix de carrière que j'ai fait pour tout vous dire je commençais à chercher à changer de métier vous voyez parce que je me disais que on soigne plus avec le cœur j'ai je rencontre très peu de médecins et mes collègues médecins vont me détester mais je rencontre de moins en moins de médecins qui soignent vraiment avec le cœur et là-bas ils m'ont réconcilié avec mon choix de profession parce que je c'est un c'est un métier passion que je fais c'est une mon métier est une passion euh sans parler de des missions humanitaires je parle vraiment du métier que je infirmière c'est quelque chose que j'ai toujours voulu être et devenir et ils m'ont redonné foi en mon métier et en l'humanité vraiment ils sont résilients ils sont pleins d'espoir alors je suis un petit peu triste parce que durant les 15 jours que j'ai passé avec eux ils avaient la certitude qu'ils allaient jeûner le mois du Ramadan euh sereinement avec un cess le feu ou au minimum une trêve et malheureusement ce n'est pas arrivé donc je suis triste de cela pour eux il m'en parlent beaucoup je je suis en contact avec eux quotidiennement il m'en parl beaucoup je suis triste pour cela mais ils sont plein d'espoir quand je leur ai dit que le peuple beaucoup de peuples était avec eux on voit les manifestations à travers le monde et que tout le monde viendrait les aider à reconstruire le pays ils m'ont répondu cette phrase qui m'a beaucoup touché non non ne venez pas tout de suite nous reconstruirons nous-mêmes et vous viendrez fêter cela avec nous trouvé ça très touchant votre témoignage est très touchant percutant et au moment où Israël s'apprête à amener une offensive sur Rafha alors qu'on apprend que des enfants des gens meurent de faim littéralement donc ce n'est pas demain la veille que ça va se régler tout ça alors merci beaucoup d'avoir témoigné pour nous ce soir et promettez-nous de rester en contact avec nous et de nous faire signe quand quand vous repartirez on pourra parler également merci beaucoup courage à vous merci à vous pour voir nos émissions en entier rendez-vous sur la chaîne ici à RDI