[Camille] Alors évidemment je dis papa, maman. Papa qui s'appelle Alain Chai, maman qui est Julie Langlois, Kéthya Chai qui est ma kéké, ma petite sœur. Bon il y aurait eu une 5 ème personne si on avait pu faire honneur à la famille au complet. On a un frère aussi Charlie qui n’est pas avec nous, qui travaille à Montréal en ce moment donc oui tout le monde a quelque chose à faire. Donc on est les quatre en studio et là aujourd'hui c'est un sujet, comment le prendre ? C'est un sujet qui va allier autant pour moi la passion que peut-être... [Julie] Le défi. [Camille] Oui des défis, ça va peut-être être un cri du cœur un peu, peut-être pour moi de revenir sur cette expérience d'ancienne athlète paralympique, mais je suis contente de vous avoir avec moi en studio parce qu' en fait vous m'avez suivi tout au long de mon parcours d'athlète et ça va être intéressant pour moi, en fait peut-être que même les rôles vont être un peu inversés, je pense que c'est vous qui allez surtout me poser des questions ou me relancer sur plein de sujets. Donc pour faire une mise en contexte il y
a quelques années, j'ai commencé en quelle année à faire de l'escrime ? 2000... Peut-être 2016 à peu près et ben pour ceux qui ne savent pas l'escrime c'est un sport de combat, c'est le fameux sport où on utilise des épées, des sabres, des fleurets, où on est habillé tout en blanc avec le fameux masque sur le visage. Donc c'est un sport en fait qui m'a vraiment rendue curieuse. En fait non je vais partir du début, il y a un homme qui m'a approché il y a plusieurs années quand j'étais jeune, donc on a grandi à Laval et je pense que je me promenais dans notre quartier avec mon vélo adapté à l'époque. [Kéthya] Ouais c'était ça, oui. [Camille] Et il y a un homme qui m'approche et qui me dit : « Et toi, là je te vois sur ton vélo tu as l'air sportive. » , il dit : « Ça fait longtemps que je te cherche. » Je me dis mais qui c'est celui-là et il me dit : « En fait, je suis un maître d'armes, j'enseigne donc l'escrime et je veux enseigner ou apprendre à une personne handicapée à faire de l'escrime donc dans l'espoir de se rendre aux Jeux paralympiques. » [Julie] Donc tu correspondais à ce qu'il recherchait comme malformation en fait
hein c'est ça ? [Camille] Oui, on peut dire pour une fois qu'une malformation remplit un critère
bien précis. Mais oui et il s'appelait Henri Sassine donc je le salue d'ailleurs s'il tombe sur cette émission ça me ferait bien plaisir, c'est grâce à lui que tout a commencé pour moi. Donc j'ai toujours aimé le sport vous en êtes témoins c'est même vous mes chers parents qui m'avez toujours encouragé à toujours foncer et à tout essayer malgré le bras et la jambe qui manquaient. [Julie] Ce n’était pas difficile, tu as toujours été très dynamique, fonceuse mais bon là ça allait un petit cran plus loin quand même. [Camille] Un petit cran ? Oui avec tout ce qu'on va vous dire c'est peut-être plus que juste un petit cran, mais oui donc j'avais envie et cet homme me parle d'un nouveau sport que je ne connais pas donc moi la logique c'est de répondre : « Bah bien sûr ! » , donc il m'a invité à aller voir un entraînement qui avait lieu dans le collège Régina Assumpta à Montréal et j'ai adoré, donc j'ai commencé à faire quelques cours, des entraînements avec lui, mais très rapidement ces entraînements se sont arrêtés parce qu'on a eu le projet de famille dont on a parlé précédemment qui était de déménager puis d'aller de s'installer au Cambodge. Mais au
retour de ces 3 années à peu près où je suis resté au Cambodge à mon retour ici ça m'était resté en tête ce projet. [Kéthya] Est-ce que c'était parmi un des premiers projets que tu as repris quand tu es revenue ? Ça s'est fait assez rapidement il me semble à ton retour au Canada non ? [Camille] Oui. Je pense que oui parce qu'en fait quand je suis revenue, j'ai continué mes études donc j'ai fait une formation pour être thérapeute en relation d'aide et en même temps suite à ça c'est après en fait que j'ai commencé à me dire, en fait j'avais le choix soit de développer ma clientèle et commencer en tant que thérapeute, mais c'est à ce moment-là que cette rencontre avec l'équipe nationale d'escrime donc à l'INS, à l'Institut national du sport à Montréal donc
c'était au stade olympique. J'ai eu un contact, je suis allée les voir et encore une fois ça s'est fait très rapidement donc l'homme que j'avais rencontré en question à Laval, c'était plus avec lui en fait que j'ai poursuivi ce projet même ce rêve. [Kéthya] Mais il t'avait fait germer cette
idée. [Camille] Exactement, que je n’avais jamais oublié. Donc 4 ans plus tard je me suis dit : « Aller, je veux réessayer, me redonner une chance en fait dans ce sport-là. » [Julie] Et c'est vrai que comme c'était pour éventuellement entrer dans l'équipe du Team Canada c'était un beau projet c'est ça, c'est motivant. [Camille] Oui, c'était quelque chose de gros puis moi donc je suis allée les voir, ils m'ont tout de suite accueilli à bras ouverts et en fait ils étaient très contents parce que l'équipe d'escrime en fauteuils roulants, ils étaient très peu nombreux, ils étaient
peut-être trois athlètes seulement à l'époque. Et moi j'en ai fait partie, j'ai été la 4e et il y a un jeune athlète, un autre donc on a été cinq au total seulement. Mais ils étaient contents de voir que c'est peut-être la relève sachant que c'est bon malheureusement un sport qui n'est pas très connu. [Julie] Et pourquoi en fauteuil roulant ce sport-là ? [Camille] On dit l'escrime paralympique qui est l'escrime en fauteuil roulant parce que tous les athlètes qui pratiquent ce sport paralympique doivent le pratiquer assis dans un fauteuil roulant, peu importe le type de handicap qu'ils ont. On doit tous être dans un fauteuil donc par exemple moi je porte une prothèse de jambe, je ne porte pas de prothèse de bras pour l'instant mais j'aurais pu. Et
ben même si dans la vie de tous les jours moi je marche avec ma prothèse je dois m'asseoir dans le fauteuil même si je ne me déplace pas en fauteuil roulant. [Kéthya] Oui, pour que vous soyez tous au
même niveau dépendamment, les handicaps sont tous différents. [Camille] Exactement. [Julie] Mais il y a aussi différents classements. [Camille] Oui, en fait là donc on parle de la classification donc comment ça fonctionne ? C'est que tout le monde est sur un fauteuil roulant, mais tout le monde n'a pas le même type de handicap donc il faut aller faire un test avec je sais plus quel spécialiste, mais peut-être physiothérapeute ou dans des gens du milieu et ils vont observer
pour voir quelles sont nos capacités physiques et nos incapacités aussi. Donc par exemple ceux qui sont paraplégiques ou même bon quadriplégiques c'est peut-être un petit peu plus intense parce que là pour faire de l'escrime, il faut quand même pouvoir tenir l'arme, mais pour ceux qui sont paraplégiques donc qui sont souvent en fauteuil roulant, qui n'ont pas de force dans les jambes au niveau du bas du corps donc nous on va être classifié dans certaines catégories A B ou C. Donc la catégorie A dont je fais partie c'est ceux qui ont plus de mobilité malgré le handicap. [Julie] Tu as tes abdos aussi ce qui fait que tu as une certaine tonicité. [Camille] Un certain tonus exactement. Ceux qui vont être dans la catégorie B sont ceux qui sont paraplégiques ou en fauteuil roulant et catégorie C vous comprenez le principe. Et déjà la classification aide, mais c'est sûr que ce n’est pas parfait à 100 %, parce que comment on peut comparer deux personnes handicapées, mais avec un handicap différent, mais bon ça c'est une première chose. Et voilà c'est ce qui explique le fauteuil roulant et pour vous donner des détails techniques de comment ça fonctionne parce que c'est vrai que je l'ai dit ce n’est pas très connu ce sport-là et encore moins au paralympique. Quand on est dans le fauteuil roulant, le fauteuil roulant est fixé sur une plaque métallisée qui est au sol et donc en fait on est les deux adversaires un petit peu de côté, assis sur leur fauteuil, ils se font face et en fait il faut que je sois
clair dans mes explications justement une chose en tête. Pour déterminer la distance, parce que deux athlètes n'auront pas la même longueur de bras, il faut que ce soit équitable ou juste selon les règlements donc on doit en fait plier le bras donc c'est comme si on lève le bras et on plie l'avant-bras vers le haut donc on fait un angle de 90° avec notre bras et l'autre personne adversaire va déplier son bras avec l'arme qui tient au bout de sa main et donc le bout de la pointe doit arriver au coude exactement. Donc c'est comme ça qu'on détermine la distance entre deux adversaires, celui qui a la main la plus courte ou le bras le plus court va décider s'il veut être plus proche de l'adversaire donc s'il veut prendre sa distance à lui ou la distance de l'adversaire. Bon bref ce sont des petits détails. Pourquoi on est sur une plaque de métal ? Parce qu'il faut que ce soit fixé parce que attention on est assis, on est des personnes handicapées assises dans un fauteuil roulant mais ça brasse. [Kéthya] Tu as oublié de mentionner, mais vous êtes attachés avec une sangle à la chaise pour être complètement immobilisés non ? [Camille] Oui, en fait pas tout le monde parce que la plupart des athlètes ont leurs deux bras malgré tout alors pour moi ou ceux qui avaient seulement un bras, parce que normalement quand tu as tes deux bras, tu as la main dans laquelle tu tiens ton arme, l'autre main doit absolument être fixée donc tu dois toujours te tenir. [Kéthya] Tu ne peux pas utiliser ton bras pour contrebalancer ou quoi que ce soit ? [Camille] Non, il faut toujours tenir l'accoudoir qui est sur l'autre côté du fauteuil donc ça permet de donner une limite quand on veut aller plonger vers l'avant pour aller toucher
l'adversaire le plus loin possible. Donc la personne ne doit se tenir par exemple je suis droitière je tiens l'arme de ma main droite, la main gauche va toujours tenir la poignée sur la gauche. Moi je n'ai pas de bras gauche alors c'est peut-être un avantage ça me permet d'aller encore plus loin quand je me penche vers l'avant, mais il faut quand même des sangles dont tu parles Kéthya donc c'est d'ailleurs un de mes collègues d'entraînement Matthieu Hébert qui m'a lui-même cousu et qui a conçu ces sangles et ça m'est arrivé en compétition de tellement vouloir aller à l'attaque vers l'avant que mes sangles en velcro ne m'ont pas retenu donc j'ai basculé, je suis tombée de mon fauteuil. Donc c'est des choses qui arrivent, donc c'est un sport qui est quand même très intense. [Julie] Exact et nous évidemment malheureusement on n'a jamais pu assister à aucun de tes combats. [Camille] Parce que vous habitez au Cambodge. Et ça je vous dirais que ce n’est pas un regret, mais ça c'est un souhait que j'ai eu pendant
ces trois, quatre années où j'ai pratiqué ce sport de façon intensive. J'avais toujours
l'espoir le petit rêve en moi que vous arriviez à une compétition ou que je vous vois. [Kéthya] C'est sûr qu'avoir le support de la famille. [Camille] Mais bon vous étiez là, le support je l'avais à distance en ligne, par téléphone. [Julie] En garde c'était en ligne. [Camille ] Exactement. [Kéthya] Donc finalement tu as fait combien de compétition en tout ou du moins à l'étranger ? [Camille] Je peux dire que j'ai vu peut-être 4 ou 5 pays, je suis allée en Italie deux fois, en Hongrie, en Hollande, en Pologne donc aux Pays-Bas. Kéthya peut-être même on pourra en reparler plus tard, les Pays-Bas c'est un petit un pays que tu connais aussi de par tes propres expériences donc on en reparlera peut-être dans un prochain épisode. Donc à peu près 5 compétitions
internationales et j'ai participé au championnat panaméricain en 2018 en Saskatchewan là où j'ai gagné ma fameuse médaille d'or. Je suis quand même fière, merci, merci. Je ne le mentionne pas souvent mais de prendre le temps d'en faire une émission et de parler de tout ce vécu c'est sûr que ça me fait revivre ou retoucher un peu à cette fierté parce que je vais vous décrire tout ce parcours qui a quand même été merveilleux mais aussi laborieux. [Julie] C'est ça autant l'un que l'autre et nous aussi on a eu ces émotions-là aussi, où on avait des frustrations, on avait des espoirs, on était content, mais on voyait que ce n’était pas facile pour toi déjà au niveau de l'entraînement parce que c'est ça du moment où tu les as rencontrés, ton entraîneur, ton équipe, ils ont vu que tu étais motivée c'est ce qu'ils voulaient savoir aussi hein au départ ? [Camille] Tout à fait. [Julie] Ils ont vu que tu étais motivée donc là c'était les entraînements qui commençaient, aussi tu avais un entraîneur physique pour développer ton corps, tes abdos, ton bras, ta force. [Camille] Exact, donc moi du jour au lendemain.. [Kéthya] Tu deviens athlète professionnel de haut niveau. [Camille] Voilà je faisais un sport de haut niveau et donc je découvrais tout ce monde qui est très discipliné, c'est la discipline avant tout, c'est la rigueur, c'est la volonté, la détermination. Je dois avouer quand même que j'ai grandi avec toutes ces valeurs grâce à vous, grâce aussi je pense à ma propre volonté intérieure de vouloir faire les choses malgré mon handicap. Et donc c'est vrai qu'après avoir assisté à un premier entraînement ils m'ont dit : « Bah Camille le prochain c'est mardi on t'attend. » et tout a commencé comme ça. Et à partir de ce mardi, j'ai fait trois, quatre années où chaque mardi, chaque jeudi j'allais au stade olympique pour m'entraîner durement. [Kéthya] Pour avoir une idée de ton emploi du temps durant cette carrière sportive, à quoi ressemblait ton temps libre ? Est-ce que tu pouvais travailler à côté ? Est-ce que tu avais assez d'énergie pour ton train quotidien ? [Camille] Alors ça me demande de... [Kéthya] Comme on n’était pas là, mais je sais que ça a pompé beaucoup d'énergie. [Camille] Je suis contente d'en reparler puis j'espère faire honneur un peu à tous les athlètes qui s'entraînent encore dans toutes les disciplines. [Julie] C'est une réalité tout ça là. [Camille] Et surtout étant handicapée c'est ça que je veux mettre en lumière aujourd'hui avec vous, c'est justement bon la réalité c'est-à-dire que j'y allais deux jours par semaine, moi j'ai toujours eu du travail ponctuel donc moi je suis en communication bon vous savez en ce moment je suis animatrice donc animatrice à la radio, à la télé selon les contrats. Je donne aussi des conférences, mais en fait moi à cause de mon état et de mon handicap je ne peux pas me permettre d'avoir un travail 5 jours sur 7 à temps plein, c'est beaucoup trop demandant. [Julie] Ton problème toi c'est l'énergie, c'est comme si tu avais une batterie qui se déchargeait très rapidement et tu mets beaucoup plus de temps que la normale pour recharger tes batteries, on en sait ce que c'est. [Kéthya] Faut le rappeler aux gens, mais c'est qu'est-ce que ça veut dire, que tu décharges rapidement, c'est que tu manges plus lentement, tu manges moins donc il faut que tu manges plus régulièrement, après manger il faut préparer la nourriture à une main c'est fatiguant après tu as besoin de faire plus de siestes et c'est vrai qu'on voit que... [Julie] Oui déjà de vivre pour toi... [Kéthya] De Vivre déjà c'est déjà beaucoup. [Julie] Donc là tu t'embarquais dans quelque chose de gros qui te demandait beaucoup, mais tu avais ta motivation donc tu laissais de côté je pense les côtés plus négatifs non ? [Camille] Exactement, c'est ma façon de fonctionner depuis toujours donc c'est quelque chose qui était tellement excitant et c'était l'inconnu, mais de me dire que j'allais m'entraîner pour représenter notre pays, représenter le Canada à l'international dans des compétitions, ça c'était une motivation. Deuxième chose c'était de faire du sport pour moi personnellement qui ait toujours aimé. C'était une opportunité pour moi parce que c'est toujours un jeu avec mon corps de tester mes limites, de connaître mes capacités, de les repousser. En fait c'est le discours que j'ai avec vous hein papa maman depuis que je suis petite de savoir quand je ne suis pas capable. Déjà « je ne suis pas capable » c'est une phrase que je ne disais jamais donc quand je savais à l'intérieur que j'avais une difficulté à faire quelque chose. [Julie] D'ailleurs tu disais : « Je suis papable ! Je suis papable ! » [Camille] Bon ben voilà, ça commençait par ça. Et donc j'étais très têtue quand je voyais que j'avais une difficulté à faire quelque chose ben mon but c'était de réussir à la faire quand même donc le sport ça a été toujours quelque chose de très stimulant pour moi, même quand j'étais au primaire face à tous les autres élèves quand tu es jeune déjà il faut faire ta place. Bon le fameux regard des autres quand
tu es enfant, quand tu es différent tout le monde le voit, tout le monde te pointe du doigt, tout le monde t'appelle « l'handicapée ». [Julie] Donc tu veux performer, tu veux faire tes preuves aussi même si c'est inconsciemment bah c'est ça. [Camille] Oui, oui j'ai toujours voulu me surpasser pour moi-même et c'est vrai face aux autres aussi. Plus on grandit moins en tout cas je vais parler pour moi moins j'ai ce besoin de prouver face aux autres, mais c'était aussi une quête personnelle de me dire de voir jusqu'où je peux aller. [Julie] Excuse-moi aussi, l'équipe te poussait, ils ont vu aussi que tu avais des aptitudes aussi, toi comme tu as qu'un seul bras, ton bras est très fort et très puissant puis tu es une fille tonique donc c'est sûr que pour l'escrime c'est explosif. Donc tu avais les éléments c'est ça donc c'est ce qu'ils ont vu aussi, ils ont dit : « Bon on va la pousser, elle a déjà au départ la mécanique pour ça. » , sauf que nous on te voit y aller et puis c'était difficile hein surtout qu'on disait que tu as des classements, tu dois te classer et tout. [Camille] Mon classement international par rapport à tous les autres athlètes bah voilà on peut en parler aussi de ça, c'est justement la réalité , c'était que pour faire partie donc de l'équipe nationale comme n'importe qui je devais faire mes preuves très rapidement. Ils m'ont envoyé faire une première compétition, je crois que ma première compétition avait eu lieu en Italie et ils m'ont dit, j'ai plus les chiffres exacts en tête, mais : « Il faut que tu sois Camille parmi les 12 premières meilleures pour accéder au carding. » bon le terme anglophone c'était le « carding » mais c'était le financement en fait. [Julie] Pour faire partie de l'équipe Canada et aussi avoir droit à tout hein les physios. [Camille] Et être payée aussi, de recevoir un certain montant qui me permet de payer les compétitions voilà parce que les compétitions au début étaient à mes frais et je le dis à mes frais, mais à nos frais parce que évidemment les parents vous m'avez aidé de votre poche aussi. [Julie] Bien sûr oui. [Camille] Fait que ça a été... [Julie] Donc billets d'avion, équipements. [Camille] Oui, billets, équipements, l'hôtel sur place il faut que ce soit payé, tous les déplacements pour se rendre à l'aéroport que j'y aille avec ma propre voiture ou en taxi tout ça c'est moi qui dois le payer donc le fameux financement que j'espérais avoir en étant bien classée bah ça a commencé à mettre une pression tout de suite. [Kéthya] Mais toi encore plus énorme parce que dans ta vie du quotidien tu as déjà une pression que tu ne peux pas avoir un travail à temps plein. [Camille] Non moi je gagne modestement ma vie je vais dire ça comme ça ou simplement. [Julie] Je me souviens qu'après tes entraînements tu allais faire du tutorat donc tu étais claquée, tu ne mangeais pas, tu ne dormais pas assez. [Camille] Je me souviens oui c'est vrai. [Julie] Mais tu étais motivée donc ta tête voulait mais ton corps pas trop. [Camille] Mon corps suivait au début, il a eu du mal, mais voilà vers la fin que je me suis calmée, ça c'est une notion intéressante aussi le fait d'écouter son corps qu'on ait un handicap ou pas c'est important, mais quand tu es handicapée je vais dire ça comme ça c'est peut-être un peu plus intense ou même violent des fois si tu n'écoutes pas assez ton corps et que tu tires trop l'élastique, ça te revient très rapidement en pleine face. [Kéthya] Mais c'est sûr parce que toi par exemple mais ça peut être pour n'importe quel handicap tu te fais mal au bras, mais tu en as qu'un. Tout de suite tu es clouée au lit puis t'as intérêt que quelqu'un puisse venir t'aider parce que sinon ça devient compliqué. [Julie] Je me souviens qu'au début c'est ça comme tu dis quand tu étais jeune on te poussait puis toi-même tu te poussais donc on t'aidait à ce que tu progresses et là depuis quelques années on disait que nous on est devenu un peu contre ce sport parce qu'on te voyait aller puis on s'est dit qu'on connaissait ta réalité, on voyait tout
ce que ça impliquait pour toi au niveau monétaire, santé et que tu n'avais pas l'appui que tu aurais dû avoir surtout que tu représentais Team Canada puis on n'est pas ici pour parler contre ou quoi mais c'est juste la réalité comme tu disais des gens du sport. [Camille] Merci de le mentionner maman si il y a des gens même de la Fédération, mes collègues d'entraînement ou quoi que ce soit c'est un partage d'expérience comme tu dis c'est pas pour dénoncer, pas dans le côté négatif, mais juste pour partager l'expérience et la réalité. [Julie] Parce que l'escrime n'est pas un sport qui est glamour non plus, c'est pas comme le hockey, le tennis. [Camille] Non exactement, donc au niveau justement des financements que la Fédération même peut avoir ou même qu'elle est reconnue ou qu'elle suscite l'intérêt de n'importe qui, bah c'est déjà minime comparé à d'autres sports ici comme le hockey, le soccer bon peu importe même bon donc ça c'était une chose. Donc moi par exemple on m'avait dit : « Si tu veux avoir droit au financement tu dois te classer parmi les 12 premières meilleures athlètes à l'international. » Et entre-temps quand j'ai fait cette première compétition en Italie les règlements ont changé et évidemment ils resserraient un petit peu
les critères et donc j'étais celle qui passait juste en dessous quoi, si ça n'avait pas changé j'aurais eu droit à ce financement mais j'étais celle qui : « Non on te coupe à cause des nouveaux règlements. » [Julie] Et non seulement tu n'avais pas le financement mais ici quand tu t'entraînais tu n'avais même pas l'aide que tu aurais dû avoir. Tu te stationnais, t'allais au stade olympique il fallait qu'elle se stationne à trois, quatre rues. [Camille] C'était à moi de trouver ma place dans toutes les rues. [Julie] Donc déjà pour nous c'était une aberration, on se disait : « Mais il n'y a personne qui peut parler pour toi ou qui peut te fournir ça. » Donc tu avais ton équipement, combien ça pesait ton équipement ? [Alain] Tu avais le gros sac, tu avais le fauteuil roulant. [Camille] Voilà le fauteuil roulant, en fait c'est handicapant pour moi de me déplacer avec un fauteuil quand je marche. [Alain] C'est toi qui devais pousser le fauteuil roulant. Et quand tu prenais l'avion, tu étais toute seule à déplacer 80 kg d'équipement tes armes, ton fauteuil et ta valise. [Camille] Mes sacs, mes valises oui à peu près ça, à peu près 80 kg plus ou moins. Bah c'est ça donc quand en fait j'habitais à Montréal dans un condo donc je devais descendre le fauteuil roulant donc dans les escaliers, des fois j'étais aidée, j'ai mon conjoint mais qui à cette époque-là je n'étais pas toujours accompagnée. [Kéthya] Oui tu n'étais pas toujours accompagnée. [Julie] Et nous on était pas là donc c'est ça. [Camille] Et je me souviens, j'ai des souvenirs de charger ma voiture, mettre le fauteuil d'une main, le mettre dans le coffre de la voiture, l'énorme sac qui est très long parce qu'il faut qu'il y ait des armes donc tu sais une arme c'est pas télescopique les épées. Moi je faisais donc de l'épée et du sabre donc je devais avoir au moins deux épées, deux sabres sinon trois de chaque arme. [Alain] Plus le plastron et le casque. [Camille] Voilà exactement, la veste, les masques j'en avais plusieurs, il faut un masque spécifique pour l'épée, des masques pour le sabre, les gants, tous les fils aussi parce qu'on est branché, c'est connecté tout ça. Donc tout ça dans ma voiture et je me souviens de cette fameuse compétition en Italie c'était au mois d'avril et c'était une année où on a eu une tempête d'hiver très tardive à la fin du mois d'avril. [Julie] Tout était bloqué, les routes hein, tout était paralysé. Des gens dormaient dans leur voiture pendant des heures je me souviens de ça. [Kéthya] Oui parce que tous les vols avaient été annulés à cause de la tempête. [Julie] Et je me souviens, excuse-moi au loin, moi j'entendais la radio, j'écoutais la radio à distance pour voir un peu où tu étais par rapport à quand tu partais, si tu allais manquer ton vol ou pas. [Camille] Mais quand je suis arrivée à l'aéroport là il était temps que j'arrive dans le stationnement parce que je ne voyais plus rien dans mon pare-brise, mais vraiment. [Julie] Et tu ne pouvais pas faire marche arrière puis retourner à la maison. [Camille] Non non, donc je me suis stationnée, j'ai pris la navette, des gens m'ont aidé à mettre tout, mon fauteuil et mes sacs dans la navette, j'arrive à l'aéroport, j'apprends évidemment que les vols sont annulés, j'ai attendu 12h donc j'ai passé 12h dans l'aéroport ça devenait, c'est devenu le chaos dans l'aéroport parce qu'évidemment tout le monde qui manquait leur vol, tous les gens qui ont manqué leur vol bah ça se plaignaient, on a dû chacun se faire des lits de fortune. Quand on a compris qu'on devait passer la nuit-là tout le monde, les gens se sont jetés sur les bancs, les chaises, les fauteuils confortables donc il n'y en a pas beaucoup. [Julie] Les grands paniers, les trucs pour mettre dans les bacs en plastique. [Camille] Dans lesquels on met nos effets personnels. Bah moi c'est comme ça que je me suis fait mon lit de fortune, j'ai mis quatre ou six bacs en plastique collés les uns sur les autres à l'envers je me suis couchée là-dessus, j'avais mon matériel d'escrime et donc à l'épée en fauteuil roulant on doit porter une jupette, une jupe qui est métallisée. Donc moi j'ai pris ça là, la grande jupe pour pour me couvrir et ça a été une expérience incroyable, mais je vous dis c'était le chaos. [Julie] Et tu étais toute seule, ton équipe était où pendant ce temps-là ? [Camille] Bah en fait c'est parce que souvent on se rendait chacun de notre côté donc des fois. [Julie] Question de budget c'est ça aussi ? [Camille] Oui, oui exactement une question de disponibilité, il y en a un par exemple qui allait quelques journées avant parce qu'il pouvait se le permettre avec sa famille ou pour se remettre plus rapidement du décalage horaire pour être plus.. [Kéthya] C'est quand même aberrant parce que tu es handicapée donc c'est évident que tu es une athlète donc tu dois économiser ton énergie finalement toi le combat démarre bien avant le combat sur le fauteuil. [Camille] Moi voilà, mon combat il commençait bien avant le combat d'escrime c'est le cas de le dire. [Alain] Les gens étaient étonnés d'ailleurs tu étais au couleur de Team Canada il y avait personne. [Julie] Tu poussais toute seule ton chariot avec ton matériel . [Camille] Ils disaient : « Comment ça se fait que c'est moi qui ne te connais même pas, qui t'aide à traîner tes choses pour t'aider à monter dans l'avion. » Bah je ne me posais pas de question, je me disais bah parce que je suis toute seule les autres arrivent demain, après-demain ou ils sont déjà là donc c'est comme ça que ça se passait donc c'était sportif. [Julie] Donc en Italie qu'est-ce qui s'est passé pour le truc donc tu l'avais raté je pense ? [Camille] Bah oui voilà effectivement j'ai manqué ma compétition en Italie, comme je vous ai dit tout ce que ça coûte en termes d'argent, mais d'investissement, d'entraînement et il y a le classement là je me dis qu'il faut que je monte dans le classement mondial pour obtenir le financement par la suite. Là j'ai manqué mes compétitions, mes combats donc aucune chance de monter dans le classement, l'argent était dépensé j'ai mon billet d'avion, ma chambre d'hôtel donc je me suis rendu jusque là-bas quand même et donc la fédération d'escrime italienne a été très gentille, ils sont allés m'acheté parce que quand je suis arrivé en plus ma valise était perdue, retardée aussi et mon fauteuil roulant aussi pour la
compétition donc ils m'ont acheté des vêtements des sous-vêtements pour que je survive
jusqu'au lendemain, puis tiens je vous garde en haleine, on va passer à la pause puis je vous garde la suite pour le retour. [Kéthya] Vous écoutez une famille aux quatre coins du monde avec Camille Chai. [Camille] Et oui ça me fait plaisir d'entendre cette petite voix-là, qui est la voix de ma sœur de toi Kéthya. [Kéthya] Je suis là. [Camille] Exactement, merci à Mathieu Tessier à la mise en ondes pour ce petit clin d'œil qui a eu cette idée de te faire enregistrer cette petite phrase. [Julie] De faire souffrir un peu. [Kéthya] Oui c'est plus difficile que ce que ça en a l'air. [Camille] Bon on pourra parler de ton métier de chroniqueuse à la radio après alors. [Kéthya] Eventuellement. [Camille] On en revient à ce dont on parlait juste avant la pause donc on était en Italie à ma première compétition donc vol manqué, compétition manquée, les valises qui sont arrivées en retard. [Julie] Toi, est-ce que tu étais consciente ? Est-ce que tu avais le stress de voir que tu
seras en retard ? Est-ce que tu connaissais les horaires ? [Camille] C'est sûr que j'avais le stress parce que non seulement c'était quand même mes débuts et ce qui est stressant là c'est ça c'est que quand tu arrives là je savais que je manquais mes compétitions donc je me demandais bah qu'est-ce que ça va avoir comme impact ? Et je me souviens que ça m'avait beaucoup fatiguée physiquement et mentalement parce que je crois qu'ils m'ont donné une nuit, j'ai dû passer une nuit à Londres je pense ou dans une autre ville et attends où est-ce que je m'en vais avec ça ? De me remettre là-dedans, ça me fait vivre tellement d'émotions. Mais c'est ça je savais que j'allais tout manquer et je me disais que tout cet argent dépensé et tout cet entraînement et cette visualisation des combats, de ce que je devais faire exactement qui tombe à l'eau. Puis en même temps je me suis dit que c'est comme ça et ça m'apprend de vivre le handicap, il y a plein de choses qui ne se passent pas comme prévu, il faut apprendre à rebondir et à accepter les choses même quand elles sont difficiles. Donc il y a un moment où je me souviens j'étais au comptoir d'enregistrement puis quand elle me disait : « Madame vous devez dormir, on va vous donner une nuit à cet hôtel-là, vous allez prendre une navette pour reprendre votre avion après. » Je me souviens que j'avais envie de pleurer, je me sentais toute seule à me dire : « Est-ce que je vais réussir à atteindre ma destination finale ? » , et en même temps je me suis dit que
c'est comme ça, il faut que je l'accepte. Donc je suis arrivée en Italie quand même tellement heureuse de retrouver déjà mes coéquipiers, mon équipe qui m'attendait, qui m'envoyait des messages que je pouvais lire à chaque escale et de retrouver aussi la grande famille des
escrimeurs parce que je me suis tellement lié d'amitié avec beaucoup d'athlètes. Puis c'est quand même quelque chose de précieux quand tu es handicapée d'avoir cette communauté de personnes handicapées avec qui on partage, puis on est tous athlètes et
on est tous handicapés donc on sait tous ce qu'on vit à peu près, on est lié quoi. [Kéthya] Ça doit quand même être un moment magique, des nationalités différentes, tout le monde vit la même affaire finalement donc tu te sens vraiment chez toi. [Camille] Oui. Et ça c'est ce que j'adorais donc même si je me disais que j'avais manqué mes compétitions, mes combats, ça va. Je vais descendre dans le
classement international c'est comme ça. Ça fait partie de l'expérience, mais c'est ça Kéthya, j'étais tellement excitée par tout ça, de me dire déjà j'adore le voyage, j'adore le sport donc de faire les deux en même temps pour moi c'était un rêve que je vivais. [Julie] Mais tu as gagné une médaille quand même. [Camille] Oui, c'est tellement mignon parce que comme je n’avais pas fait de combat bah pendant les cérémonies de remise de médailles moi je me promenais sur le site, je discutais avec les amis tout ça puis un moment il y a quelqu'un de la fédération italienne qui vient me chercher en courant : « Camille ! Camille ! Camille ! Camila ! Camila ! Vite ! Vite ! Vite ! » je dis : « Qu'est-ce qu'il se passe ? » il me dit : « Viens ! Viens ! Viens ! Ils t'ont appelé sur la scène. » , je réponds : « Pourquoi ? je n'ai rien fait. » Et finalement je monte puis ils disent : « On veut t'offrir cette médaille pour ton esprit sportif et ta belle attitude. » Et donc ils l'ont dit à tout le monde, tout le monde le savait que j'étais la petite Canadienne qui avait manqué son vol à cause de la tempête de neige et tout ça. Et c'est vrai que ça a été un voyage quand même pour moi malgré tout. [Julie] Mais c'est bien parce qu' ils ont vu ton attitude et ils comprenaient aussi ta réalité, ce n’est pas tout le monde qui comprend même si tu ne fais pas de sport ou quoi dans ta vie de tous les jours, tu as une réalité ou même si tu as le sourire, tu as l'attitude, tu dois te battre sans arrêt. [Camille] Il y a une chose que je peux raconter justement pour cette réalité que les gens ne savent pas nécessairement, le fait de voyager de faire des longs vols ou même des vols de quelques heures seulement, quand tu portes une prothèse tu as toujours un peu un inconfort que tu sois assise, que tu sois debout, que tu sois en train de marcher ou en train d'attendre il y a une fatigue,. [Kéthya] Tu transpires dans ta prothèse après tout ça devient humide, c'est inconfortable. [Camille] Il faut donc penser dans l'avion, est-ce que je dois mettre un pantalon qui va me permettre d'enlever ma prothèse de jambes pour respirer un peu et être mieux ? Ou non j'ai mis un legging qui est trop serré donc là je peux pas me changer comme ça dans l'avion parce que ça devient compliqué. Tout le monde le sait c'est étroit, tu n'as pas d'espace ou je mets ma jambe ? Il m'est déjà arrivé dans une compétition pour me rendre je sais plus sur quel vol, j'avais enlevé ma prothèse de jambes, je l'avais mise devant moi par terre et il y a un agent de bord qui est arrivé avec une couverture pour recouvrir la jambe, pour la cacher, pour ne pas faire peur. [Julie] Ah bah oui, c'est vrai. [Camille] Aux gens qui étaient dans l'avion aussi. [Kéthya] Est-ce qu'il t'avait prévenu ou tu l'as juste vu ? [Camille] Elle est juste arrivée donc ils ont dû se dire oula ça. [Alain] Elle va avoir froid. [Camille] Oui c'est ça, ils ne veulent pas que j'aie froid moi aussi. [Julie] Ou que ça sente les pieds. [Camille] Ou eux ça leur donné un petit frisson de marcher puis de voir une jambe. [Kéthya] Ouais c'est ça et je voulais que tu nous racontes aussi de quoi ça avait l'air une compétition comme tu nous disais justement pour faire un clin d'œil. [Camille] Tu l'as nommé tout à l'heure le fait de se retrouver tout le monde dans des hôtels donc il y a une ambiance aussi d'être dans les hôtels c'est toujours un peu festif même si c'est la compétition, c'est stressant, c'est sérieux. Il y a toutes les odeurs déjà juste les vêtements, tout notre matériel
d'entraînement, bah je vous le dis, mais ça sent pas bon parce que ça sent la transpiration. Attends c'est en quels matériaux ? C'est quoi le type de tissu de ces vestes-là ? Si je dis « kevlar ? » je ne sais pas si je dis n'importe quoi. [Kéthya] Ça coûte un peu plus cher ça. [Camille] Bon en tout cas c'est une matière qui est très épaisse parce qu'il faut que ça nous protège des coups d'épée, des coups de sabre. [Julie] Et toi tu transpires toujours beaucoup déjà. [Camille] Je transpire sans rien. [Julie] Parce qu’aussi tu as moins de surface de peau pour régulariser ta température, ça c'est un fait pour toi, tu auras toujours plus chaud que n'importe qui d'autre. [Camille] Donc ça c'est un fait donc le fait de s'habiller donc tu l'as dit tout à l'heure papa, il y a la coquille donc pour protéger la poitrine donc ça c'est en plastique ensuite par-dessus tu as le sous-plastron qui est un petit morceau de vêtements qui protège la manche, par-dessus tu mets ta veste qui est très épaisse autant pour le sabre ou pour l'épée ensuite bah là tu as le bas qui est un petit pantalon 3/4, tu dois mettre des bas qui montent jusqu'en haut du mollet, tu as tes chaussures, le casque. [Julie] Donc déjà pour toi juste de mettre ça c'est difficile à une main aussi. [Camille] Oui de faire ça une main les zips, il y a plein de sangles. [Julie] Oui puis déjà tu as chaud, tu es fatiguée, tu as utilisé ton bras hein ? [Camille] Je l'ai utilisé plus qu'il n'en faut. [Kéthya] Mais quand tu combattais, tu enlevais toutes tes prothèses, non ? [Camille] Oui c'est ça. [Kéthya] Donc durant les compétitions tu as des prothèses qui traînent partout, non ? [Camille] Et c'est ça qui m'a marqué, mais dans le bon sens, que j'ai adoré, je me dis tu sais quand tu dis le sentiment d'appartenance puis d'être un groupe, il y avait plein de jambes partout qui traînaient. Quand tu finis ton combat il faut presque que tu cherches la tienne parmi les autres jambes. Il y en a qui se trompaient qui commençaient à vouloir la mettre, oups non ça fonctionne pas. Donc ça c'était une image vraiment marquante. [Julie] Puis vous êtes dans votre plus grande fragilité tout le monde, c'est quand même de l'humilité hein ? [Camille] Oui parce que ma façon de l'expliquer pour moi la façon dont je le voyais, c'est je me dis qu'on enlève nos prothèses donc tout ce qui nous aide à fonctionner au quotidien, tous ces artifices-là, on les enlève pour mettre à nu notre handicap, pour mettre à nu notre malformation. Dans une prothèse il y en a qui ont un moignon, il y en a qui ont un doigt, deux doigts bon peu importe, moi mon petit pied dans ma prothèse de jambes, j'ai un petit pied avec seulement quatre orteils donc quand j'enlève ma prothèse bah les gens voient mon petit pied, ce qu'ils ne voient pas normalement quand je porte ma prothèse donc ça demande cette humilité comme tu dis maman, d'accepter d'être vu dans notre plus simple expression, en état de vulnérabilité, ça reste un handicap. [Julie] Et tu dois aller te battre. [Camille] Mais on fait ça pour se battre. [Kéthya] C'est quand même beau parce que vous repoussez vos limites, dans votre état le plus vulnérable. [Camille] Et à l'essence aussi puis de se dire qu'on fait ça pour se transformer en guerrier pour aller partir au combat puis donner notre 110 % et même moi j'ai été une athlète, mais même moi au début d'avoir assistée aux autres combats, c'est tellement impressionnant. On pense que ce sont des athlètes handicapés, qu'on est peut-être moins fort ou quoi que ce soit, mais détrompez-vous la puissance, l'explosion, il y a une force malgré le handicap, on a une force et c'est ça moi qui m'a motivé à vouloir faire du sport de haut niveau. [Julie] Je me souviens quand je suis allée au stade quand tu faisais tes entraînements, c'était déjà quelque chose, de voir les autres athlètes des autres disciplines parce que tu avais des coureurs, tu avais n'importe quel type de sport, c'était beau de voir ça, ces athlètes-là, la détermination, la force. [Camille] Oui puis pour moi justement quand j'allais revoir tous les athlètes qui venaient de tous les pays à travers le monde, mais moi j'aurais aimé pouvoir aller visiter tel athlète en Grèce, en Italie, en Argentine, partout en Espagne, pour voir dans quelles conditions est-ce qu'ils s'entraînent. C'est pour tous très différent, il y en a qui s'entraînent, ils viennent des pays chauds, il y en avait qui venaient de la Thaïlande, de l'Inde. Comment eux ils s'entraînent, à quoi ça ressemble ? [Julie] Et comme tu disais aussi l'équipe italienne qui était très nombreuse aussi entre les combats, qu'est-ce qui se passait ? [Camille] Mais c'est que c'est cet esprit sportif et de groupe comme tu dis ils étaient nombreux puis bah il faut le dire les Italiens quand ils font
quelque chose, quand ils sont fiers d'eux tout le monde l'entend, ils font du bruit, mais j'aime parce que ça mettait de l'ambiance, ça mettait de la vie, ça donnait envie de se dépasser
encore plus et donc quand il y a un qui fait un combat puis qui gagne un combat et tu as toute l'équipe qui est assise à côté de nous, qui se lève, qui crie, ça donne des frissons, ça te
transporte. [Kéthya] Et en fait pour Team Canada est-ce qu'il manquait des athlètes ? C'était quoi leur le nombre idéal ? Qu'est-ce qui explique qu'il n'y avait pas assez de monde. [Camille] C'est parce que le sport n'est pas connu il faut les trouver les athlètes, il faut trouver une personne handicapée qui a envie de faire du sport de compétition. Cette réalité-là que je vous raconte depuis tout à l'heure de avant l'entraînement en escrime il faut faire un entraînement au gym avec un autre entraîneur. Tu as une journée
de repos, mais il faut que tu fasses attention à ce que tu manges, ton travail moi je ne pouvais pas me permettre donc il y en a qui disent : « Non » puis ça coûte cher, comme on le dit l'équipement aussi d'escrime donc il faut avoir ces moyens-là, il faut pouvoir se le permettre. [Kéthya] Et comparé aux autres pays, est-ce que la taille des équipes est pareille? [Camille] Il y avait certaines équipes qui avaient très peu d'athlètes comme nous Canada, on était trois, quatre, mais il y en a
qui était six, sept, huit ou même un peu plus. [Julie] Est-ce qu'ils allaient chercher plus de médailles ? Forcément. [Camille] Ils étaient forts aussi même les Français étaient beaucoup plus nombreux que nous, bah il faut dire que l'escrime c'est un sport qui a vu le jour en France si je ne me trompe pas. Je sais en tout cas dans d'autres pays aussi, mais les Français sont très
très forts aussi. [Kéthya] C'est plus populaire en France. [Camille] Exactement plus populaire, donc nous on était quand même une petite équipe et ça me faisait rêver de les voir aussi plus nombreux, mais en même temps je me sentais faire partie de cette famille donc je le vivais aussi à travers tout ça. Mais je vais faire une parenthèse, je veux prendre le temps quand même de encore aujourd'hui ça fait plusieurs années donc que je ne fais plus d'escrime, mais je veux remercier encore une fois mes coéquipiers mes entraîneurs parce qu'ils m'ont tellement
aidé dans mon parcours, tout le monde, chacun. Ils m'ont tous donné quelque chose, ils m'ont aidé financièrement, ils m'ont aidé avec le matériel, ils m'ont aidé à transporter mon matériel aussi dans les compétitions donc ça n'avait pas de prix pour moi. [Julie] C'est ce qui est beau dans le sport l'entraide, la solidarité. [Camille] Les valeurs qu'on partageait c'était quand même unique. [Julie] Et donc quand tu as fait ta dernière, quand est-ce que tu as su que tu voulais arrêter finalement le sport ? Est-ce que c'était clair ou... Je dis ça mais nous on t'encourageait à arrêter. [Camille] Oui vous en fait tu poses la question, mais tu fais partie de la réponse parce que c'est vous en fait qui à distance, une famille aux quatre coins du monde, moi je faisais des compétitions aussi dans d'autres pays vous vous étiez au Cambodge, mais on s'appelait, vous me suiviez dans tout ce que je faisais et je pense que dans ce que je vous racontais vous voyiez que je commençais à m'épuiser un peu, à être plus fatiguée. Je vais le nommer aussi, il y avait un peu une frustration qui commençait à s'installer de par le manque d'aide financière d'aide matérielle, tu le disais tout à l'heure maman j'avais la motivation, ça me faisait oublier tout le reste, mais après 3 4 ans. [Julie] Oui parce que tu visais les paralympiques aussi tu voulais aller à Tokyo et tout ça. [Camille] Oui c'est ce que je voulais, me rendre aux jeux paralympiques de Tokyo. [Julie] Mais nous on voyait que c'était de payer trop cher. [Kéthya] Et tu t'étais arrêtée vraiment juste pas longtemps avant les Jeux de Tokyo, non, il me semble vraiment au dernier moment tu avais décidé de te retirer. [Camille] Ouais pas si longtemps avant les Jeux de Tokyo. Même d'en reparler aujourd'hui ça me fait un petit peu mal au cœur quand même. [Kéthya] Tu aurais aimé continuer. [Camille] J'aurais aimé continuer, je vous le dis ça me donne des frissons, ça n'a pas
été facile de prendre cette décision d'arrêter. Vous m'avez ouvert les yeux, vous m'avez aidé à voir plus clair là-dedans parce que c'est beau de foncer, de se surpasser, de donner tout ce qu'on a, mais un moment donné quand tu écoutes vraiment ton corps et que tu vois les signes bah c'est là où j'ai dû m'arrêter et prendre cette décision pour moi. Puis une chose tu n'as pas besoin d'y réfléchir longtemps, le manque de soutien financier aussi en fait tu te dis bon il faut s'arrêter. Vous m'avez aidé, moi à la base j'ai horreur
de demander de l'argent. [Julie] Oui il fallait que tu fasses des levées de fond. [Camille] C'est ça je n'avais pas le temps ni l'énergie pour faire ça. [Julie] En plus c'est ça tu n'as pas l'énergie, mais tu dois te battre pour aller chercher des sous en plus, ce que tu avais commencé à faire, mais ce n’était pas possible. [Camille] C'était trop laborieux et tout ça on le répète à côté de mon quotidien déjà de personne handicapée. [Alain] Ouais tu avais été obligé de réduire ton temps de travail pour t'entraîner plus donc gagner moins d'argent donc automatiquement ça te mettait en difficulté. [Camille] Je vais le dire, ma carte de crédit était dans le négatif et je me souviens qu'un moment j'allais à Montréal pour un rendez-vous je ne pouvais même plus payer mon parcmètre avec ma carte de crédit et là je me suis dit que c'était un petit peu une alarme. [Julie] Et tu avais presque même le sentiment d'imposteur du genre je veux pas me plaindre, je ne veux pas faire celle qui est au-dessus de tout ça donc. [Camille] Non et je n'avais pas envie d'abandonner. Je n''aime pas abandonner, vous m'avez toujours appris à aller jusqu'au bout et ne pas abandonner. [Julie] Et ton équipe qui voulait t'avoir aussi, il continuait de pousser parce qu'il voyait qu'il y avait du potentiel. [Camille] Moi je ne voulais pas, mais c'était ma famille je ne voulais pas ne plus faire partie du Team Canada non plus, c’était devenu ma vie pendant les dernières années. [Kéthya] C'est difficile de quitter ça après quelques années puis que tu faisais partie du groupe. [Camille] Bah Kéthya tu le sais un peu toi aussi, t'as fait du soccer bon quand tu étais plus petite, mais quand même à un niveau compétitif. Tu as dû quitter toute ton équipe quand on
a déménagé au Cambodge. [Kéthya] Oui, c'est la famille. [Camille] Il y a un deuil à faire ? [Kéthya] Bah oui, tout à fait. [Camille] Et je vous dis j'ai de la difficulté à respirer parce que ça vient tellement me chercher émotionnellement. Je me suis rendue compte et c'est les gens aussi justement on l'a dit tout à l'heure quand ils me croisaient à l'aéroport ou dans la rue qui disaient : « Mais où est ton équipe ? Comment ça se fait que tu as personne pour t'aider à traîner tes deux sacs, ton fauteuil et tout ça ? » et là je me suis dit : « OK, il y a un truc qui ne marche pas, il faut
que je fasse des choix. » Et j'étais fatiguée, j'étais réellement épuisée et donc c'est un petit peu avant les Jeux panaméricains. [Alain] On en avait parlé et puis on avait dit : « Bon, fais-les et tu arrêteras après. » et toi finalement tu les as fait, ça t'a donné le feu parce que tu savais que c'était les derniers combats que tu faisais. [Camille] Donc ça m'a donné le feu. [Alain] C'est là que tu as gagné la médaille. [Camille] Bah j'ai gagné la médaille d'or et on dirait que c'est ça, je me suis dit : « J'y vais. ». J'étais tellement triste de me dire que j'allais certainement arrêter après, je me gardais peut-être un 10 15 % de peut-être que, mais bon mon idée était quand même plus ou moins faite et je suis parti avec cette conviction. Je sentais le feu, bah c'est ça je le sentais brûler en moi, je suis arrivée là-bas, j'ai gagné tous mes combats, je les ai toutes massacré. Je vous dis, je veux dire le sport quand tu le fais pas à moitié, tu le fais à 100 %, tu te commets et ce que j'ai appris, ce que l'escrime m'a appris c'est que justement au début d'un combat il y a l'arbitre qui dit : « En garde ! Prêt ! Allez ! » Et cette fameuse phrase, elle te reste tellement en tête parce que pendant que l'arbitre dit ça toi pendant ce temps-là il faut que tu saches ce que tu vas faire, qu'est-ce que va être ton prochain coup, est-ce que tu vas aller à l'offensive à la défensive, est-ce que tu vas faire tel coup. [Kéthya] Oui tu es en train d'avoir toutes tes tactiques. [Camille] Voilà tu dois regarder ta stratégie et quand tu entends l'arbitre dire : « Allez ! » bah l'idée que tu as en tête, voilà tu gardes ton idée et tu te commets, tu vas à 100 % avec donc si je me dis aller j'attaque, je plonge vers l'avant et je l'attaque à la poitrine ou en dessous de la main ou sur le masque, bah tu le fais parce que si ton idée n'est pas claire au moment où l'arbitre dit : « Allez ! » mais que ton adversaire lui dans sa tête son attaque, son action elle est claire. [Julie] C'est une fraction de seconde. [Camille] C'est une question de fraction de seconde. Et donc ça m'apprend dans la vie tous les jours que quand tu fais face à une situation ben c'est à moi de me demander qu'est-ce que je fais si je parle de façon imagée, est-ce que j'avance ? Est-ce que je recule ? Est-ce que si je dois reculer c'est parce que je n’ai pas eu le temps de réfléchir à mon action ? J'ai besoin de gagner un peu de temps donc je me repousse vers l'arrière pour essayer d'esquiver peut-être l'attaque de l'autre, bah c'est un peu ça aussi la vie. C'est un peu comme l'escrime pour le décrire très simplement c'est Pierre Mainville qui a été aussi mon mentor pendant toutes ces années, mais j'ai envie de dire que tous mes coéquipiers ont été des mentors chacun à leur façon pour moi. Bah il me disait c'est très simple l'escrime c'est comme un jeu de "roche papier ciseaux" c'est ça tu dois choisir l'action, tu as tant d'action que tu
peux faire, tu choisis et quand c'est parti tu l'as fait. Ça fonctionne ou ça ne fonctionne pas. Et aussi à quel point tous les échecs tous les coups qui sont manqués bah c'est ça qui te mène vers la victoire. C'est la phrase un petit peu qu'on entend souvent ce n'est pas la finalité qui est importante donc ce n'est pas tant la médaille qui est importante en soi, mais c'est le parcours. Mais c'est vrai que c'est ça, c'est tout ce que j'ai appris pour me rendre jusqu'à cette médaille, la médaille est une symbolique de tout ce qui s'est passé avant. [Julie] C'est beau. En fait on cherche toujours à prouver ou à voir jusqu'où on peut aller, tu l'as vu quand même, là tu peux te permettre d'être un peu plus, ça c'est un conseil de parents, d'être un peu plus douce avec toi être un peu moins combative. [Camille] Votre discours change comparé à quand j'étais plus jeune. [Julie] Oui parce que tu vieillis aussi. [Alain] On devient plus sénile donc ça change. [Julie] Même je me souviens après ça tu voulais faire un autre sport en disant peut-être le badminton c'est plus léger j'ai moins de matériel à porter. [Camille] J'aurais aimé, j'aurais aimé faire du tir au pistolet, j'aurais aimé tout ce
qui est précision, j'aime bien un peu tout ça. [Julie] Tu te souviens quand on t'a approché pour faire le rallye des gazelles automobiles, là tu y pensais, je me disais : « Non non non on ne s'embarquera pas encore dans plus dangereux. » [Kéthya] Moi je veux revenir à l'escrime , quand tu as annoncé que tu allais arrêter, quelle a été la réaction de l'équipe ? Est-ce qu' est-ce qu'il le voyait venir ? [Camille] Je ne sais pas s'il le voyait venir, mais c'est sûr que ça été un coup dur parce qu'ils m'ont toujours encouragé, ils m'avaient prévenu, ils m'ont dit : « Camille, il y a des fois où tu vas vouloir abandonner, mais il ne faut pas que tu abandonnes. » Et cette phrase-là m'est restée très longtemps c'est pour ça que ça a été difficile pour moi. Mais après je me disais que c'est ma vie,
c'est ma réalité. Leur réalité n'est pas la même que la mienne. Et quand tu dis maman de vouloir un peu ralentir la cadence aujourd'hui. [Julie] Beaucoup. [Camille] D'accord le message est passé. Bah c'est que j'ai d'autres projets aussi, j'ai envie de fonder ma famille ça fait quelques années que j'essaie d'avoir un enfant. C'est le corps qui va devoir travailler, faire tout ça donc il faut que je laisse la place et le repos à ça aussi. [Julie] Et toi ton handicap aussi c'est quand même gérer ton énergie c'est tout ça, tu sais il y a d'autres personnes avec qui tu étais tes coéquipiers, c'était genre une jambe un peu plus courte que l'autre donc pour eux peut-être c'est moins difficile de vivre ou de fonctionner par rapport à toi. [Camille] Pour moi voilà ma réalité à moi ça reste ça, même si je fais plus d'escrime je peux vous le dire ma vie reste un combat, c'est quand même un combat tous les jours. Je le dis avec le sourire, attention je le dis avec le sourire parce que c'est la dernière attitude avec laquelle je veux regarder la chose, voir la chose, mais il y a des moments où c'est pas facile. Ça je vois que ça commence à se retourner contre moi maintenant parce que de trop montrer que je suis quand même positive, heureuse, joyeuse, mais j'ai beaucoup de difficultés aussi que les gens ne savent pas. Donc il faut que maintenant je laisse plus la place à ça, que je fasse plus honneur à ma réalité dans toutes ces formes. [Julie] En fait il faut que tu te respectes parce que souvent tu es sollicitée pour faire plein de trucs surtout que tu travailles à ton compte quand même un peu, tu as des contrats donc tu dois choisir ce qui est le mieux pour toi. [Kéthya] Moi je peux parler pour toi parce que c'est toujours difficile de parler soi-même et on va toujours avoir tendance à vouloir être modeste, mais moi j'ai été témoin puis c'est ça si tu es trop positive et que tu es trop toujours forte après les gens autour de toi commencent à dire : « Camille pourquoi tu commences à te plaindre ? Pourquoi tu es fatiguée ?Pourquoi tu veux prendre du temps pour toi ? » . On t'en demande un peu trop donc ouais c'est sûr... [Camille] C'est vrai bah c'est dur pour moi. Parce que c'est comme si ça tombe dans la plainte et je ne veux pas me plaindre. [Kéthya] Mais si, une personne handicapée est handicapée. [Julie] Ce n’est pas de se plaindre c'est de parler de ta réalité, te respecter aussi. [Camille] Puis ça me fait penser à moi que c'est ce que je dois faire envers moi-même, mais ce qui est incroyable aussi c'est la gentillesse de tous les gens que j'ai rencontré pendant ma carrière d'athlète paralympique, tous les inconnus qui ont croisé mon chemin, je peux dire ça comme ça, qui ont mis leur pierre à l'édifice ou qui ont mis leur petite touche dans cette magnifique expérience que j'ai vécue. C'est toute l'aide que j'ai reçue de ces inconnus, des gens qui pendant la tempête de neige j'avais des coupons, la compagnie
me dédommageait pour aller m'acheter à manger, mais c'était que pour du fast food donc un
moment je vais m'acheter une salade ou quelque chose de plus santé puis il me dit : « Non Madame, ce n'est pas ici. » [Kéthya] C'était à l'aéroport. [Camille] Oui à l'aéroport. Il y a un homme qui a dit : « Madame la facture, c'est pour moi Madame, je vous l'offre. » Je me suis fait offrir des repas, je me souviens je pense que j'étais en Allemagne, on courait pour prendre le métro, il y a des inconnus donc qui me voient pousser le fauteuil et traîner le sac du mieux que je pouvais, ils m'ont dit : « Viens monte sur ton sac, je mets ton sac sur ton fauteuil. » et il courait avec nous, il nous poussait, je me retournais je leur disais : « Merci ! Merci ! ». J'en ai
des frissons, les gens qui nous faisaient... [Alain] Les militaires en Italie aussi. [Camille] Les militaires en Italie, je m'étais tellement lié d'amitié avec eux que quand on quittait le lieu de compétition pour retourner à l'hôtel bah il y avait des grands autobus où tous les athlètes allaient dedans, moi je montais dans le van des militaires donc j'étais dans leur camion avec eux. On les entend se parler en italien, mettre de la musique, rigoler tout ça. [Julie] C'est intense. [Kéthya] Ça permet de vivre des choses. [Camille] Ça m'a fait vivre des choses, là j'ai des frissons, j'ai adoré. Donc comme j'ai dit en début d'émission merci encore à toutes ces personnes puis juste un dernier aussi. J'arrivais à l'aéroport les gens me voyaient habiller en Team Canada, la compagnie aérienne un homme tellement gentil qui m'a permis d'aller dans le salon VIP où il y avait un buffet où j'ai bien mangé alors que je n'étais pas VIP. La compagnie aérienne il me donnait pendant le vol des cartes de souhaits avec des pierres précieuses pour me souhaiter bonne chance pour ma compétition, bon enfin je dois m'arrêter là. Mais merci encore une fois à tout le monde, tous ceux que j'ai croisés sur mon chemin pendant cette expérience, merci à tous mes coéquipiers d'entraînement, mes entraîneurs tout ce que j'oublie, tout le monde est dans mon cœur donc merci infiniment. Et c'est déjà tout. J'en parlerai encore plus, on a 2 minutes où on peut peut-être prendre le temps de respirer. Je ne sais pas si vous avez quelque chose que vous voulez rajouter de souvenir en tant que suiveur ? Vous m'avez suivi quand même dans cette expérience-là. [Julie] En fait c'est une grande fierté ce que tu as accompli, mais bon ça nous étonnait pas quand même tout ce parcours-là parce que toi il n' y a rien d'impossible avec toi, mais aussi de prendre conscience d'être plus mature, plus te respecter. [Kéthya] Et avec cette expérience, est-ce que éventuellement plus tard tu aimerais te rapprocher du sport ? Est-ce que c'est une avenue ? [Camille] Ça reste là quand même c'est sûr, je vais rester une fière ambassadrice du sport, de montrer aux gens. Je veux quand même que les gens, c'est ça aussi mon but, c'est de montrer qu'on peut être handicapé, il me manque un bras, une jambe, mais regarde je représente notre pays dans l'équipe nationale d'escrime. J'ai voyagé, je me suis battue. [Kéthya] On pourra dire avec cette expérience que tu as vraiment repoussé tes limites. [Camille] Ça je pense qu'on peut au moins le dire. [Alain] Félicitations. [Camille] Merci mon papa, merci infiniment. Merci à vous de m'avoir encouragée, suivie
pendant toute cette expérience, merci d'avoir été avec moi aujourd'hui, merci à Mathieu Tessier qui est à la mise en ondes, on ne l'entend pas, mais il est là, on est content de l'avoir avec nous. Merci à vous chers auditeurs de nous avoir suivi dans ces grandes péripéties. J'espère que ça va vous donner l'envie de vous dépasser peut-être vous aussi, d'essayer peut-être un sport, ne serait-ce que de marcher quelques minutes par jour, juste commencer par ça. On se redonne des nouvelles au prochain épisode. Au revoir tout le monde.
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[musique] j'ai 40 ans je suis atteinte d'une amyotrophie spinale infantile qui est une maladie neuromusculaire mes muscles ne se développant par l'arrêté la marche à l'âge de 10 ans que je pratique le tir à la carabine depuis presqu'un peu plus de 30 ans maintenant et j'ai eu la chance de participer... Read more
Mah se souviendra toujours de ce moment qui a fait basculer sa vie j'ai été blessé pendant des bombardements par les avions militaires du régime syrien après cette attaque j'ai perdu mon bras gauche amputé à tout juste 15 ans le handicap lui a permis de découvrir une nouvelle passion le football après... Read more
Le nageur brésilien gabriel dos santos araujo surnommé gabriel zino est devenu une figure emblématique des jeux paralympiques de paris 2024 malgré une malformation congénitale qui l'a privé de ses bras et lui a laissé des jambes atrophiées gabriel zino a remporté trois médailles d'or dans les épreuves... Read more