Estelle Youssouffa, députée LIOT de Mayotte | Politiques, à table !

Générique ... -Bonjour à tous ! Bienvenue dans "Politiques, à table !" On parle cuisine, alimentation, agriculture, écologie, mais aussi politique, avec Estelle Youssouffa. Bonjour ! Merci d'être avec nous. Avec moi, Jean-Pierre Montanay. -Bonjour à vous ! -Bonjour. -Députée Liot de Mayotte, vous avez commencé votre carrière comme journaliste à la télévision, à LCI, TV5 Monde, Al Jazeera, BFM TV, ou I-Télé, avant CNews. Un point commun entre nous, ça s'arrête là. Votre seul et unique combat, c'est la défense de Mayotte, pour vous, vice-présidente de la délégation outre-mer de l'Assemblée et fille de militaire mahorais. En 2019, vous prenez la tête d'un collectif de citoyens contre l'immigration comorienne. A Libération, vous appelez la France à envoyer aux Comores des fusiliers commandos pour dynamiter les usines qui fabriquent les embarcations qui permettent aux Comoriens de rallier les côtes de l'île. Votre revendication : "Prendre conscience de l'annexion "par le peuplement." Vous parlez de colonisation et vous appuyez fortement la fin du droit du sol à Mayotte, annoncée par l'exécutif. Pendant les législatives, en 2022, votre surnom était "Poutou mgowa", "piment oiseau". On attend un menu épicé. -Epicé, oui, pimenté, je l'ignore, avec un poulet au lait de coco, gingembre, curcuma, et vanille. En dessert, salade de fruits à la vanille. A fond la gousse ! -A fond la gousse ! Elle est là, avec moi. -Dans Le dessous des plats, la cuisine créole est méconnue, et pourtant, elle regorge de saveurs toutes plus alléchantes les unes que les autres, découverte au Salon de la gastronomie des outre-mer. -Mayotte, à sec, malgré le retour des pluies. L'eau ne coule pas tous les jours au robinet, quelles conséquences pour les habitants ? -Allez, on passe à table. Tout de suite, Cuisine et confidences. -En tant que pasionaria de la cause mahoraise, chaque sortie médiatique, pour vous, est l'occasion d'en parler, pour dénoncer, oui, le chaos qui la submerge, vous, la mercenaire autoproclamée au service de Mayotte. Rien à voir avec le sulfureux Bob Denard, au treillis militaire, vous préférez votre mythique et très élégant châle que vous portez, pour défendre une île française, au point que les Mahorais vous surnomment, comme on l'a dit, ce "Poutou mgowa", un piment, certes, tout petit, mais qui pique très fort. Attention, nous voilà prévenus ! La transition est toute faite avec la table, car vous vantez les saveurs culinaires de votre île. Vous auriez pu proposer le pilao, la paella locale, parfumée au safran, le kakamcou, je sais pas si je le prononce bien, soupe de poisson... Mais vous avez tranché pour un poulet coco préparé avec les trésors de l'île, le lait de coco, mélange de chair et de l'eau de la noix, le curcuma, qui nourrit et soigne... Votre touche personnelle, la vanille, la fierté de Mayotte. Ce plat, c'est, pour vous, l'ambassadeur culinaire de l'île ? -Alors, en fait, je suis venue avec la vanille de Mayotte. Merci pour cette invitation. Je pense qu'on voit que j'aime manger ! Comment dire ? La vanille de Mayotte a gagné, au concours agricole, la médaille d'argent. Mayotte, son surnom, c'est "l'île aux parfums". Nous sommes dans le canal du Mozambique, sur une route qui, de manière multimillénaire, faisait le commerce des épices. Mayotte est une île volcanique, donc, avec une terre extrêmement fertile. Nous avons interdiction, depuis que nous sommes enfants, de jeter un noyau quand on mange dehors, parce que ça pousse. Très vite. -Légende ? -C'est très vrai. -Un noyau, un arbre. -C'est très, très vrai. -Il n'y a plus d'eau à Mayotte. -Oui. C'est très vrai. Si vous jetez des noyaux de papaye, ou de mangue, 6 mois après... -Ca sort du sol. Rires -C'est vrai, c'est pas une légende. Donc, "l'île aux parfums", parce que la vanille, la meilleure du monde, mes collègues tahitiens... -Aucun régionalisme. -Aucun. Du tout. Donc la vanille, la girofle, la cannelle, le poivre, sont des épices... La cardamone... Tout pousse à Mayotte. C'est l'île aux parfums. On a l'habitude de manger épicé, mais au sens propre, c'est-à-dire, des épices. Pas nécessairement pimenté. Mon surnom, qui m'a été donné par des humoristes à Mayotte, qui ont fait l'état-civil des candidats aux législatives, m'ont appelée "Poutou mgowa", que j'ai gardé comme emblème, parce qu'en fait, dans un plat mahorais, le piment est toujours servi à côté, mais il est indispensable pour le plat. On l'estime terminé quand on a le piment. C'est le plus beau compliment que pouvaient me faire les Mahoraises et les Mahorais qui notent mon sale caractère et nous renvoient à la nourriture, car on est une population gourmande. -Dans ce plat, c'est une touche personnelle, la vanille ? -La recette, je sais que mes compatriotes vont dire : "Bon, la vanille..." Non, il n'y a pas de... Mais, en fait, mon papa, quand nous habitions dans l'Hexagone, faisait, chaque dimanche, un poulet au coco. -C'était le repas de famille ? Et c'est votre papa qui cuisinait, à la maison ? -Le boeuf bourguignon mahorais. -Il nous faisait ce poulet, qui a un parfum très particulier... Il y a la couleur, qui est superbe, un peu dorée, qui est celle du curcuma, qui est très doux, qui est enveloppant, et on sent les effluves... -La vanille, c'est la touche de votre papa, que vous gardez. -Que j'ai gardée et que j'utilise comme prétexte pour mettre en avant cette merveilleuse vanille qui est superbe, et dont je suis dingue. Quand on était enfant, il y en avait tellement à Mayotte, qu'on vendait des jouets de vanille tressée. On pouvait pas imaginer que ça pourrait devenir aussi précieux... -On la retrouve dans tous les plats ? -C'est un de nos mystères. On en fait pousser, je suis l'ambassadrice de nos agriculteurs, et en fait, on la cuisine très peu, alors qu'on cuisine toutes les autres épices. La vanille fait partie des objectifs du mandat, qu'on développe un livre de recettes avec la vanille, et moi, je contribue, et j'en cuisine. -Elle s'exporte beaucoup. On la trouve un peu partout ? -Très peu. -Vous en faites quoi, de la vanille ? -Vous avez relancé, j'ai vu... -Oui, exactement. Une partie de mon travail est de faire venir les marchands, donc, Roellinger... Expliquer que c'est une vanille de niche, qui est très précieuse, car elle est bio, faite à la main et française. Et aider, euh... Nos grands maîtres cuisiniers, pâtissiers, dans l'Hexagone, à connaître cette vanille. J'en ai offert, j'en ai envoyé. -Aux pâtissiers. -En leur disant : "Découvrez, cuisinez, inventez des recettes." Je pense que ce sera jamais une production énorme comme celles que font... -Madagascar ? -Ou La Réunion, ou Tahiti, mais c'est... -Elle est particulière ? -Faire comprendre qu'il y a des terroirs pour la vanille et que c'est une vanille puissante et très bonne. -On l'a reçu, M. Roellinger. -Oui ! -J'espère que dans sa boutique, soit en Bretagne, soit à Paris, il y aura la vanille de Mayotte. Vous pouvez goûter ? On sent la vanille. C'est très bon. Ca manque un peu de sel. Dites-nous... C'est Chez Françoise qui a cuisiné. On retrouve l'esprit mahorais ? L'esprit du dîner du dimanche ? -Du déjeuner du dimanche ! -Du déjeuner ! -Est-ce que ça ressemble, effectivement, à vos souvenirs ? -Non, mais je suis heureuse que ça voyage. Rires -Jolie réponse. -Je trouve ça important. Le repas, c'est le partage. Et pour nous, qui sommes une île où je dois, malheureusement, par mon travail, dénoncer ce qui ne va pas, c'est important de dire aussi ce qui va, et de contribuer à une des passions françaises, qui est la cuisine. Là aussi, nous, à Mayotte, on est des Gaulois... -Quelle différence avec celui que préparait votre papa ? Le goût ? La consistance ? -Le pauvre, là, le lait de coco a tranché, il a été trop cuit. Mais, comment dire... Je pense qu'il y a une autre épice que j'arrive pas à remettre mais c'est bon. -Curcuma, gingembre, des échalotes... -Il y a autre chose. -J'ai une question. On a découvert, maintenant, en métropole, le lait de coco, il y a quelques années. Vous, le lait de coco, vous le fabriquez vous-même ? En prenant une noix, en râpant la chair et en mélangeant avec l'eau ? -Moi, quand je cuisine ? -Quand vous cuisinez. -Non ! La merveille de la bouteille... De la conserve... -Vous l'avez déjà vu faire ? -Bien sûr. On le fait pendant les fêtes. -Ca doit tout changer. -Mayotte a une très forte tradition de cuisine... Chaque fête, donc... Nos traditions sont très vivantes. Le calendrier religieux est très important. Et toutes les célébrations sont marquées par des repas partagés. C'est à minimum une trentaine de personnes, voire 100, 200, 300... Et ce sont les femmes qui préparent. Les hommes contribuent en amenant tous les ingrédients. Tout est fait au feu de bois, avec des ingrédients maison. On abat le boeuf ou les chèvres la veille, ou le jour même, c'est très, très traditionnel. C'est succulent et incroyable. Ce sont les grands-mères... Toutes les générations viennent. Les grands-mères ont des groupes de villageois, elles se réunissent et vont de fête en fête, de circoncision en anniversaire, pour les fêtes des morts, etc. Elles ont des groupes et elles vont aller de famille en famille. Elles amènent leurs recettes. Une organisation très militaire. Il y a beaucoup de hiérarchie. Il y a celles qui vont touiller, celles qui râpent le coco, dont vous parliez, les petites, préposées à la vaisselle. On amène ses marmites. C'est des moments très heureux. Depuis enfant, on fait ça. Ca perdure. On y tient. Pour les mariages, les fiançailles... On est une société insulaire, donc très attachée à la vie en groupe car le groupe, c'est la survie. L'isolement de l'insularité fait qu'on existe peu individuellement. Nos traditions culinaires sont très importantes. Et alors, les hommes... C'est une culture majoritairement musulmane. On mange de manière séparée, mais les meilleurs plats sont pour les femmes. -Pendant ce temps, trois choses à savoir sur ce plat. -Très rapidement. Ce mariage est adoubé par un tas de cultures culinaires dans le monde. Le poulet est sans doute la viande la plus consommée, et la noix de coco est un don du ciel sous les tropiques. On a vu la recette mahoraise. Avec de la vanille. On retrouve ce plat d'Amérique du sud à la Thaïlande, en passant par l'Inde. Beaucoup de similitudes entre ces recettes. Les épices diffèrent. En Inde, c'est du garam masala, un mélange d'épices qui varie selon les régions. Du gingembre frais, du curcuma, des oignons, des tomates, des pommes de terre, et du yaourt à la mode de Goa. Le poulet coco est un classique de la cuisine thaï, aussi. Avec le poulet au curry vert. Sa fameuse pâte verte. Comme les piments qui la composent. Il y a de la citronnelle, du galanga, de la crevette. Différent de Mayotte. Il se prépare avec des aubergines thaï, du citron vert, du sucre de palme, de la sauce de poisson, et au dernier moment, des feuilles de basilic thaï, au parfum si particulier... Vous aimez ? -Oui. -Le poulet coco thaï ? -Je suis une grande curieuse. Ils mangent pimenté. Dans la sauce. Nous, on le met à part. Mais comment dire ? Parce qu'en fait, le coco, c'est riche. Ca signifie la fête. C'est du travail, à préparer. C'est pas un plat qu'on mange tous les jours. On le mange, maintenant, grâce aux conserves. -Plus facilement, oui. -C'est quand même beaucoup plus de travail pour préparer. En fait, vous l'avez en bouche, c'est un goût très suave. Qui est très enveloppant. Et qui a plusieurs goûts. Et qui... Il magnifie toutes les autres saveurs. Effectivement, ça se marie avec le gingembre et toutes les autres épices qu'on peut mettre dedans. Pour les vrais gourmands, les plats au coco sont toujours meilleurs réchauffés. Le lendemain, quand le lait... -Ca tourne pas, comme la sauce ? -Normalement, non. Rires -Ca dépend de la préparation ! -Mais euh... -Soyez pas méchante. -Que ça tranche ne change rien au goût. -J'allais le dire ! -C'est juste visuel. -Quand vous dites "trancher", pour ceux qui aiment faire cette cuisine thaïlandaise ou mahoraise... -Le gras se sépare. -C'est parce que ça a trop cuit ? Je l'ai trop cuit et ça tranche pas forcément. -Vous donnez un coup de mix et... -Ouais. -Et ça refait... -Il faut pas qu'il y ait trop d'épices et d'herbes... -Une question... La différence entre le poulet au coco et le curry. On retrouve cette coco. Est-ce que c'est... Très différent ? -Alors, le curry, en fait, est un mélange d'épices qui est déjà fait. Et euh... Et la cuisson n'est pas exactement la même, c'est-à-dire que... Je suis passionnée de cuisine. Le curry, vous faites rôtir les épices avant dans la casserole, et ensuite, vous rajoutez le lait de coco. Le lait de coco à la mahoraise, on fait cuire les échalotes et puis le gingembre, on met le coco, après, on rajoute le curcuma, qui est en poudre. A Mayotte, il est frais. C'est une racine qui est semblable à celle du gingembre. Donc il est cuit avec. C'est pas un mélange d'épices comme le curry indien qui a, a minima, 5 à 10 épices. C'est pas ça. La cuisine mahoraise est plutôt simple dans les mélanges d'épices, car on aime sentir les goûts. -La cuisine mahoraise prend du temps à faire ? Ca mijote ? -Oui, c'est une cuisine... C'est une cuisine patiente. Euh mais... Comment dire ? C'est une cuisine qui a beaucoup changé, parce qu'on était une île très pauvre, qui mangeait beaucoup de poissons, d'herbes, et avec l'arrivée du supermarché, des boîtes de conserve, on mange moins frais, et donc, ça a permis de rendre plus courant les plats au coco qui étaient vraiment réservés... Râper des... Pour un plat comme ça, on peut penser qu'il vous fait deux ou trois noix de coco, ça vous prend, pour râper, 20-25 minutes. -Vous cuisinez beaucoup en France ? Enfin... Soit à Mayotte, soit en métropole ? Vous avez le temps ? -Oui. C'est quelque chose qui me vide la tête et j'aime beaucoup recevoir. -Autant à Paris que quand vous êtes sur place ? -Quand je suis à Paris. A Mayotte, je travaille trop. Quand je suis à Paris, pour faire partager. Inviter et recevoir les amis. J'aime réfléchir à concevoir les menus, faire les courses, ça me permet de complètement déconnecter. -Vous êtes à cheval sur deux cultures. Votre père et votre mère. Quand vous faites des dîners, c'est plutôt rougail, ou blanquette ? -Ca dépend des invités. Les deux. Ca peut... Jamais en même temps. Mais par exemple, ce week-end, je recevais un ami pour fêter ses 45 ans. Donc, je lui ai fait un poulet coco. Et en entrée, une salade sicilienne. C'était une salade d'orange avec des câpres et des oignons rouges. En dessert, comme j'ai vécu en Grande-Bretagne, un Eton mess, une crème fouettée, fruits rouges avec de la meringue. -C'est travaillé ! -Oui ! -Babette n'a qu'à bien se tenir ! -C'est des heures ! -J'aime beaucoup cuisiner. -Ca détend, aussi ? -Oui, oui. Ca vide la tête et c'est un plaisir d'aller réfléchir au menu, d'aller faire les courses, d'aller discuter avec les artisans des magasins de bouche... Et puis euh... Les repas démarrent toujours des discussions, qui sont passionnantes. -Vous trouvez toujours toutes les épices qu'il vous faut ? -Je fais des kilomètres pour des épices. Je suis une folle de cuisine. -Vous stockez, aussi ? -Je voyage, je ramène. -Que ne trouvez-vous pas à Paris ? A Paris, quand on va dans les quartiers indiens, chinois... -Ce que je ne trouve pas, je commande. Non, mais c'est vrai. -C'est les herbes qu'on peut ne pas trouver. -Ma famille, ou mes amis, quand ils viennent à Paris, me ramènent des produits. Quand je rentre de Mayotte, je prends des tisanes traditionnelles, je ramène mes plantes... -Tout ça s'échange et tout ça voyage, un peu partout. On va voir si vous êtes incollable. C'est le Quiz. -Alors, on l'a vu, vous êtes une grande fan de la vanille. Ces affirmations sont-elles vraies ? Il lit la première affirmation. ... -Il me semble. Il faut fertiliser. C'est une orchidée. -C'est celui qui a permis d'exploiter la production de vanille à grande échelle, sur l'île de Bourbon. L'actuelle Réunion. Bourbon, le nom d'une variété de vanille. Il a réussi à mettre en contact organes mâle et femelle d'un vanillier pour les faire progresser. Grâce à cette découverte, la vanille va se démocratiser. Il lit la deuxième affirmation. ... -A la fin du 19e ? -Voilà. -Je suis pas sûre. -100 %. -Non. Il y en a en Amérique latine et on en produit au Mexique. -Bravo ! -D'habitude, je fais les réponses... Faux, le Mexique est un autre producteur. A cette époque, avec la France, les Etats-Unis raffolent de la vanille. Il lit la troisième affirmation. ... Vrai ou faux ? -Oui. -Vrai. Trois. Bon, alors... -C'est artificiel. Mais à l'époque... -Un pharmacien avait fait ce breuvage médicinal. -On lui prêtait beaucoup de propriétés... -De vertus. Aux côtés de la vanille, existe la vanilline, chimique. Il lit la quatrième affirmation. ... Rires -Je refuse même de penser que ça puisse être vrai. -Alors ? -Non, ça peut n'être que faux. -Non, c'est vrai ! Ce parfum qui est très ressemblant... -Ce monde va à vau-l'eau ! -Pour l'instant, ce parfum qui existe, et qui ressemble à la vanille, est plutôt destiné à la cosmétique, qu'à la nourriture. -Bon, alors, quand même... -C'est pas pour demain ! -Vous me donnez le point ! Rires -Vous avez été chercheuse à l'université du Québec. Vous avez dû goûter au sirop d'érable. Sauriez-vous dire si ces affirmations sont vraies ou fausses ? Elle lit la première affirmation. -Je sais pas. On appelle ça la saison des sucres. J'ai jamais su le nom scientifique. J'ai fait la saison des sucres au Québec. C'est assez génial. -Etes-vous acéricultrice ? -Oui ? -Vrai. C'est bon. Elle lit la deuxième affirmation. ... -Oui. -Non ! Par évaporation ! -Pour évaporer, faut que ça bout. Rires Quand même ! -Il y a quand même un système... Ca chauffe et c'est évaporé. C'est vrai que c'est compliqué. Amende honorable. J'ai fait le Quiz. C'est sans doute avec un peu d'ébullition, et un peu d'évaporation. -On donne le point. Elle lit la troisième affirmation. ... -C'est possible. Il en faut beaucoup. -Euh non. Il en faut entre 35 et 40 litres. Elle lit la quatrième affirmation. Vrai ou faux ? -Aucune idée. On va dire vrai. -C'est faux. C'était un aliment tonique. -C'était pas un somnifère mais... -Ils le connaissaient. -Ils le connaissaient mais s'en servaient comme un aliment qui les réconfortait. -Je suis totalement dingue de sirop d'érable ! -Ah oui, aussi ? -J'ai étudié au Canada. -Je sais. -Effectivement... Je me morfonds de ne pas avoir de sirop d'érable. Quand on dépasse le niveau de sirop, qu'on continue à bouillir et évaporer, ça devient du sucre, et une pâte à tartiner. C'est juste diabolique. Heureusement, mon collègue Lenormand, de Saint-Pierre-et-Miquelon, qui est membre de mon groupe, avec lequel j'ai ouvert des trafics... Rires -On échange gousses de vanille contre sirop d'érable. -Exactement. On médite sur une recette. Ils ont des homards d'anthologie à Saint-Pierre-et-Miquelon. Une sauce de homard à la vanille de Mayotte. De la suite dans les idées. -Le livre... -Le poulet au sirop d'érable ? -Non, non. Non, non, non, non. -Les Québécois cuisinent la viande... -Il y a beaucoup d'hérésies mais je pense qu'on peut garder le sirop juste sur les crêpes ! C'est déjà formidable et c'est très bien. -C'est souvent autour de la table que se nouent les meilleures histoires, que se racontent la petite et la grande histoire. La brève de comptoir. Alors, on vous a demandé de vous souvenir, éventuellement, d'un souvenir politique, autour d'un repas. Est-ce que vous avez une anecdote à nous raconter ? -Alors, en fait, j'ai pensé à deux... Un repas qui n'a pas eu lieu. C'est-à-dire que je suis allée... J'ai donc étudié au Québec. A l'université du Québec, à Montréal. L'ancien président de l'Assemblée, M. Séguin, est venu y enseigner... Et en fait, je l'avais rencontré là-bas. Et à l'époque, donc, quand j'étais chercheuse, toute assistante, j'étais vraiment pas grand-chose, il m'avait dit : "Vous devriez être députée, "Mayotte a besoin..." J'avais 20 ans. Il m'avait dit : "Vous devriez servir Mayotte." Et je lui avais dit : "Certainement pas." Des années plus tard, je l'ai croisé à la brasserie Wepler, place de Clichy, où j'allais déjeuner avec des amis, ébahis de me voir traverser la salle pour le saluer. Il s'est levé et il m'a embrassée. Voilà. -Il se souvenait bien de vous. Qu'est-ce qui vous a donné envie de franchir le pas ? -Ah, c'est pas... J'ai toujours pas envie de faire de la politique. C'est malgré moi. -Vous êtes élue, hein. -Mais c'est parce que j'ai un frère très convaincant, très actif politiquement, et surtout... Comment dire ? A Mayotte, on est peu nombreux et la situation est très grave. On a tous conscience qu'il faut qu'on fasse notre part. De ma génération et plus âgés, on est très peu nombreux, avec une éducation de masse, une éducation supérieure. On est tous tournés vers le service de notre île, personne ne fera le travail à notre place. Il faut... Voilà... -Ca vous permet de faire avancer ce dossier de Mayotte. -Voilà. Oui. Mais c'était un engagement citoyen. On avait l'espoir que les élus reprennent nos revendications et comme ça a pas été le cas, la population et le... Le sénateur Marcel Henry, un des grands combattants pour la Mayotte française m'a convoquée pour me dire : "Tu seras députée." -"Sois députée "et tais-toi." -Votre avenir politique se limite aux contours de cette île ? C'est là que vous voulez travailler et rester ? -Oui. Je n'ai pas de vocation à... C'est... C'est... J'ai été journaliste pendant plus de 20 ans. J'aime observer, j'aime analyser. C'est très utile, vous voyez, pour faire savoir, et porter les problèmes de Mayotte, les faire connaître. Je pense que je ne fais pas de politique, je fais savoir à mes compatriotes une situation inadmissible, qui est indigne de la République. Je suis pas membre d'un parti, je ne suis pas encartée. J'appartiens au groupe Liot qui est un groupe technique, pas un groupe politique. Quand je dis que j'étais mercenaire, ça veut dire que je suis au travail pour mon île, je travaille avec qui il faut pour avancer. -"Tout pour Mayotte", le slogan. Rires -Il faut, il faut. On s'intéresse à la cuisine d'outre-mer, avec une inspiration créole, ces Européens nés dans le Nouveau monde, au temps des colonies. C'est Le dessous des plats. -Un tour du monde des saveurs, c'était le Salon de la gastronomie des outre-mer, organisé en janvier par Babette de Rozières. L'occasion de s'initier aux saveurs des cuisines exotiques et de découvrir les recettes cultes de neuf territoires d'outre-mer dont Mayotte, conviés à ce salon. Et Hélène Bonduelle et Clea Jouanneau se sont surtout intéressé à la cuisine créole. *-On va faire un quatre mains. Exceptionnel ! -Un chef antillais et une cheffe mauricienne, pour une recette à quatre mains. *-Un colombo de poulet. -Poulet, piment, curcuma, citron vert... Et l'une des bases de la cuisine créole... *-On va pouvoir déglacer avec le lait de coco ! -Ces jeunes chefs ultra-marins veulent démocratiser et faire connaître leur cuisine. -On transmet sans oublier l'authenticité. On veut la valoriser, l'exporter, vraiment, aux quatre coins du monde. -Une cuisine loin des clichés vus de la métropole. -Le cliché, c'est les boudins et les acras. Eh non. Elle rit. Il y a autre chose ! -Comme les christophines pochées, le riz djon djon de Haïti, ou encore ces petits sandwichs guadeloupéens, les bokits. -Une pâte à pain, on en fait un disque comme ceci, et le disque est plongé délicatement dans l'huile chaude. C'est un petit beignet fourré de morue ou de poulet, de poulet boucané. -Une cuisine épicée, marinée, aux origines multiples. -Il y a un mélange de cultures européennes dans la culture antillaise, des apports amérindiens, des apports indiens, donc de l'Inde, et des apports de l'Amérique. -Vous connaissez ? Noix de coco et sucre de canne. -C'est très bon. J'étais hésitante mais je trouve qu'il y a bien le goût du coco, les parfums, et voilà. -C'est sucré mais super bon. On s'est régalés. -Les saveurs créoles séduisent aussi les chefs étoilés, comme Jean-François Girardin, jury du concours culinaire du salon ultramarin. -Il s'effeuille magnifiquement. Il est parfait. -Bien assaisonné. Il est pas trop salé. Ca fait partie de notre patrimoine. C'est pas l'étranger, c'est chez nous. On utilise des produits ultramarins, comme la vanille. L'ananas, la vanille. Ce sont des produits qu'on utilise au quotidien et on pourrait pas s'en passer aujourd'hui. -La vanille d'ailleurs, dont les Antilles, la Réunion ou encore Mayotte relancent la culture depuis quelques années. -Estelle Youssouffa, on va profiter de votre présence pour y comprendre et trier le grain de l'ivraie. On a parlé de la cuisine créole. Vous parliez tout à l'heure de la cuisine mahoraise. Qu'est-ce qui les différencie ? Souvent, on fait des raccourcis. L'accra et le boudin, c'est créole, mais la cuisine mahoraise n'est pas créole. -La cuisine créole, c'est la cuisine des Antilles et de la Réunion, qui sont des... Et de la Guyane, que je me fasse pas... -Attention, soyons précis. -Et donc c'est marqué une cuisine qui est influencée... Il y a évidemment les terroirs, mais c'est influencé par les pratiques religieuses et puis l'histoire de ces territoires liés à l'esclavage, qui sont liés à des peuplements particuliers. Mayotte n'a pas connu l'esclavage sous la présence française, c'était la traite arabo-musulmane, et nous sommes dans notre terroir, le canal du Mozambique, avec une influence arabe qui vient du nord, qui a amené... C'est la péninsule arabo-persique donc Oman, le Yémen. C'est le pilao dont vous parliez, qui est le cousin du biryani. C'est notre voisinage immédiat, Madagascar. C'est des recettes comme le romazava. Une partie du peuplement à Mayotte est originaire de Madagascar. Et c'est la proximité avec le continent africain, donc la Tanzanie. Donc c'est une cuisine dans l'océan Indien avec une influence indienne, avec une partie mijotée que vous appelez le curry, ou le garam masala, mais qui en fait sont simplifiées, qui sont vraiment très propres et différentes de la cuisine créole qu'on connaît aux Antilles, à 3000 km de Mayotte, de l'autre côté de Madagascar. Là, il y a des communautés, les communautés chinoises, indiennes, créoles, qui ont des patrimoines culinaires différents et qui ont créé une cuisine. Le triptyque réunionnais, c'est le grain, le riz et une protéine. -Des haricots ? -Des haricots ou des lentilles, qu'on peut manger mais il n'y a pas, à la base de l'assiette mahoraise, ce triptyque. Le rougail, on en mange aussi. A la Réunion, c'est un plat qui est cuisiné, qui est mijoté. Le rougail à Mayotte, c'est une sauce crue. Le rougail tomate, par exemple, où c'est de la tomate, du gingembre, des oignons, du piment, qui est un condiment. -Il peut y avoir du riz dans l'accompagnement ? -Le riz, maintenant, on en mange beaucoup, mais le riz, qu'on cultivait à Mayotte, est lui aussi cher, précieux. On mangeait beaucoup plus des racines ou des bananes vertes. Donc la cuisine traditionnelle, familiale, est une cuisine pauvre, à base de poisson, de banane vert, de manioc, d'igname, qui sont bouillis ou frits ou en sauce comme le mtsolola. Mais le riz était secondaire. Et en fait, cette alimentation a beaucoup changé quand Mayotte a gagné en niveau de vie et s'est ouverte aux routes commerciales avec une importation régulière d'alimentation. Aujourd'hui, on était une île qui était auto-suffisante, elle n'est l'est plus en alimentation, on importe à 90 %. Par exemple, les attaques des Houthis ont perturbé les routes maritimes dont nous dépendons. Le golfe d'Aden, quand il y a des difficultés, les importations passent par l'Arabie saoudite pour aller sur la route de Mayotte. Et donc je l'ai signalé à l'Elysée en disant : "Attention, avec ce qui se passe chez eux, "chez nous, ça va mettre en difficulté notre écosystème. -Il y a un impact de la cuisine indienne, qui... Sur la cuisine mahoraise ? -Beaucoup moins que ce que vous avez par exemple dans la cuisine créole, beaucoup moins. On a un cousin du chiapati qui est le bérédjé. Il y a des influences mais c'est pas du tout la prégnance de ce qu'on veut voir dans la cuisine antillaise ou réunionnaise. Et à la Réunion, comme les communautés indiennes sont restées très importantes, elles ont gardé des traditions culinaires fortes. A Mayotte, il y a des communautés indiennes, une communauté indienne de tradition musulmane, qui n'est pas de tradition hindoue comme c'est le cas à la Réunion. Il y a des subtilités qui sont méconnues dans l'Hexagone alors que pour nous, les insulaires, les Antillais ou les Réunionnais, on sait nos cuisines. La cuisine réunionnaise n'est pas la cuisine antillaise, même si c'est le mot "créole", c'est éloigné. -Et la typicité de cette cuisine, c'est... -Excellente. Elles rient. -C'est le qualificatif. -Non, sa typicité. -La meilleure ! La meilleure. -Je ne peux pas lutter. -Les plats classiques que l'on trouve dans cette cuisine qui a pas mal évolué, c'est quoi ? Qu'est-ce qu'on... C'est à base de poulet ? -Non, traditionnellement, c'est très varié. En fait, aujourd'hui, la difficulté pour l'élue que je suis, c'est de veiller, parce qu'on a des difficultés en souveraineté alimentaire et en sécurité alimentaire, à ce que l'alimentation soit variée. La population à Mayotte a énormément augmenté, de manière très, très rapide, et donc, ça cause une pression très forte sur le foncier qui est utilisé pour des terres agricoles. Et donc la tradition mahoraise, c'est que chaque famille a des terres qu'on allait cultiver le week-end et ça permet d'équilibrer le panier alimentaire. Aujourd'hui, on importe donc c'est très cher et c'est pas frais. On a besoin de diversifier... -Vous avez de moins en moins de terres, on a construit beaucoup ? -On peut moins cultiver, on ne produit pas assez donc c'est cher, même ce qui est produit localement. Il y a une agriculture clandestine et une prédation des terres agricoles avec des produits phytosanitaires importés illégalement par les kwassa-kwassa, auquel je veux mettre fin, qui font que certains produits cultivés à Mayotte sont impropres à la consommation parce que cultivés avec des produits illégaux, donc dangereux pour la santé. On parle des tomates, par exemple. Toutes les variations de prix pour une population qui est très pauvre... Sur mon portable, j'ai beaucoup de messages pour me dire que le kilo d'oignons, très important pour la cuisine, est à 20 euros. C'est scandaleux. On me dit : "Il faut que tu travailles "pour que ça redescende à 8." On est dans une période spéculative parce qu'il y a le ramadan, donc on a une cuisine... Toute l'île jeûne, quasiment. C'est une cuisine particulière, il y a des stocks, de la spéculation. Cette question est importante. Le panier alimentaire à Mayotte, le même panier alimentaire est 167 % plus cher à Mayotte que dans l'Hexagone, le même. Donc cette question... -Vous êtes pas les seuls en outre-mer à avoir ce problème. -Une petite question, le chef a dit : "C'est notre patrimoine." Sans entrer dans la querelle de chapelle outre-mer et créole, est-ce vous trouvez qu'elle n'a pas sa juste place en métropole ? Quand on voit les restaurants, quand on parle... -Moi, j'ai 45 ans, on a fait un chemin incroyable. -Est-ce qu'elle peut avoir une place plus grande ? -On peut toujours. -Vous l'avez trouvée à Paris ? -Non, mais je vais pas me plaindre, je trouve... Je pense que pour nos chefs, qu'on soit passé en une quinzaine d'années d'une culture culinaire qui était très, très auto-centrée et qui ne regardait pas les épices autrement que comme quelque chose d'anecdotique alors que maintenant, on va chercher dans les cuisines d'ailleurs, d'autres patrimoines qui sont pas dénigrées, ça nous renvoie à nos outre-mer, pour comprendre qu'il y a des produits de grande qualité qu'il faut travailler, respecter, sublimer, pour prendre le vocabulaire des émissions de cuisine. Fondamentalement, c'est important, ça permet à nos écosystèmes de gagner en importance, et qu'ils soient mis en valeur aux concours agricoles en salon, etc., en fait, c'est très important parce que dans notre culture française, le patrimoine culinaire est important, on a fait grandir cette idée de terroir, donc inclure les terroirs ultramarins dans cette logique nationale, c'est important. Que vous découvrirez les achards, les piments, c'est très récent dans la cuisine française. Et on voit que l'inventivité qu'on peut avoir avec nos chefs, la technique, toute notre capacité à inventer fait que ça nous enrichit aussi, donc c'est... -Gagnant-gagnant. -On avance. -Vous nous parliez de l'inflation alimentaire, on va parler aussi du manque d'eau à Mayotte. Une situation critique. -Ce luxe qu'est le verre d'eau. -Qui va mettre du temps à se normaliser à Mayotte. On en parle et on met les pieds dans le plat. En France, le 101e département est à sec. La sécheresse la plus sévère depuis 25 ans a provoqué une crise de l'eau, mais les problèmes sont structurels. Des mesures de long terme s'imposent pour espérer un retour à la normale. Reportage, Clément Perrouault. -A Mayotte, se fournir en eau est une galère au quotidien. L'archipel vit au rythme des restrictions depuis l'été dernier. Aujourd'hui, malgré le retour des pluies, les Mahorais n'ont de l'eau au robinet que 2 jours sur 3. -Etre une famille de 7 personnes, avoir une toilette et ne pas pouvoir tirer la chasse d'eau de toute la journée, je vous laisse imaginer les conditions sanitaires dans lesquelles les Mahorais vivent actuellement. C'est difficile et ça a un impact sur la qualité de notre vie, sur notre santé, sur notre hygiène, même sur l'éducation des enfants. Parfois, il arrive que l'école ferme pour cause de pénurie d'eau. -En cause, la sécheresse. Il est tombé un quart d'eau de moins en 2023 qu'en 2022. S'y ajoutent une population qui ne cesse d'augmenter et des fuites incessantes, des infrastructures insuffisantes pour stocker l'eau. Pour faire face, le gouvernement a organisé des distributions d'eau en bouteille à la population. L'Etat a également payé les factures d'eau des Mahorais pendant plusieurs mois. -Il y a une prise de conscience du gouvernement mais les actions restent timides. On attend le plan de sortie de crise. Il faut des mesures sur le long terme pour que la pénurie d'eau ne soit pas la situation normale du territoire, qu'à Mayotte, ça soit normal d'avoir de l'eau 1 jour sur 2 ou 2 jours sur 3. On la veut en continu. -Le gouvernement a promis 4 millions d'euros pour mettre à niveau l'usine mahoraise de dessalement. Une seconde usine est promise pour 2025, ainsi que des investissements pour réduire les fuites dans le réseau. -On sait qu'en septembre et octobre, c'était désespérément sec. Des pluies sont tombées en décembre. Quelle est la situation aujourd'hui à Mayotte ? -Dieu merci, les réserves d'eau sont revenues à plein. Donc le gros de l'alimentation en eau potable se fait par des réserves collinaires, qui étaient à sec parce que El Nino, parce que sécheresse à la saison des pluies précédentes. La crise qu'on a vécue cet automne était tout à fait prévue et prévisible, d'où mon agacement de voir la lenteur avec laquelle... J'ai des réunions avec les services de l'Etat depuis mon élection toutes les 6 semaines sur l'évolution de la ressource en eau. -Donc l'Etat n'a pas assez anticipé ? -Il n'a pas pris les mesures. Ils ont anticipé qu'on allait dans le mur. Le mur est là, on avance. -Des bouteilles ont été distribuées. Trop peu, trop tard ? -Oui, votre servante a beaucoup insisté, et grâce à votre couverture médiatique, mais en fait, c'est la seule chose qui a fait que... On trouvait normal ici qu'une partie du territoire n'ait pas d'eau et qu'on allait se serrer la ceinture. Le pack d'eau de 6 bouteilles entre 8 et 12 euros à Mayotte, sur une population pauvre, ça n'émeut personne ici. Je vous ai dit, je ne fais pas de politique, je fais juste savoir la situation. Ca a choqué ici et ça a poussé le gouvernement à agir. Mais sur le fond, le constat est juste, c'est-à-dire que ce qui est apparu comme une crise à 4 jours de coupure d'eau, on considère comme la norme qu'on ait de l'eau 1 jour sur 2, ce qui est effarant. -C'est le cas, là ? 1 jour sur 2 ? -Oui. -Comment on vit dans ces cas-là ? -On a des seaux, vous l'avez vu dans les images, on a des seaux, des citernes. On est toujours en train de réfléchir. On fait des machines quand il y a de l'eau. Les machines... -C'est de la sobriété forcée. -Je pense qu'en fait, il faudrait aussi... Entendre que... J'ai l'espoir que cette crise à Mayotte ne soit pas gâchée pour comprendre qu'il faut un usage raisonné de l'eau, c'est-à-dire construire les systèmes d'eau avec l'eau qu'on appelle sanitaire, c'est-à-dire qui n'est pas potable et qui sert pour laver les sols, tirer la chasse d'eau. -Pas forcément potable. -Pas forcément potable et qu'on garde cette eau potable pour les besoins de cuisine et de consommation humaine. Or c'est deux systèmes d'approvisionnement en eau différents et notre pays est très en retard dessus, alors qu'à Mayotte, on a tous une consommation qui est bien moindre que la consommation dans l'Hexagone, mais on est sur un petit territoire où on pourrait être pilote pour développer cette... -La réutilisation des eaux usées qu'on veut essayer de mettre en place en métropole, vous le faites depuis longtemps ? Vous avez ces habitudes par nécessité ? -J'ai toujours été scandalisée de la communication de la préfecture de Mayotte avec des... Des images préfabriquées, "Prenez pas votre bain à Mayotte". Non mais loulou, on prend pas de bain à Mayotte, jamais. -Les douches 1 jour sur 2. -Non, nos douches, comme c'est une zone tropicale, on en prend, mais on va pas utiliser 20 litres pour une douche. On en utilise 3 ou 4. Donc en fait, cette logique qui arrive de l'Hexagone avec un usage inconsidéré, c'est mépriser le fait que nous, depuis plus de 7 ans, on est avec une distribution en eau qui est très erratique, une eau qui est extrêmement chère, extrêmement chère, et on est plus que mûrs pour une réflexion qui soit plus utile. Donc à mon avis, compte tenu du fait que la métropole découvre la rareté en eau, il y aurait des choses à apprendre. -Il y a des problèmes structurels, des fuites... -Mais je pense que fondamentalement, on ne peut avoir qu'un mix hydrique à Mayotte. On aura les réserves collinaires, on aura le dessalement, et il ne pourra être que vert, on ne pourra pas en faire avec de l'énergie importée. Il faut de l'énergie renouvelable pour le dessalement, sinon, cette eau dessalée ne sera jamais abordable. -Il faut beaucoup d'énergie pour dessaler. -Il en faut beaucoup. -Et on rejette aussi du sel dans la mer. -L'eau saumâtre, il faudrait qu'elle ne soit pas dans le lagon, c'est important. On a le plus beau lagon du monde fermé, le plus grand, qui est un écosystème magnifique, une biodiversité unique au monde qu'il faut préserver. Sur un territoire de 375 kilomètres carrés, vous avez pas une dizaine de retenues collinaires. Il y a une compétition pour le foncier. -Ils vont en faire une 3e. -C'est l'arlésienne. Le sujet, c'est qu'on la fasse mais intelligemment, qu'on soit à la hauteur, en production en eau potable, de l'évolution démographique hors de contrôle. Sur le fond, j'insiste sur le fait que Mayotte est... Innovante. Là, tous les établissements publics locaux sont en train de s'équiper pour avoir des capteurs d'humidité, pour fabriquer de l'eau qui soit utilisée pour les bâtiments. On va utiliser des captages d'eau de pluie pour alimenter les écoles. On est quand même en train de travailler très fort là-dessus et on est très loin des débats complètement ésotériques qu'il peut y avoir ici. En fait, on est déjà très économes. Il faut qu'on augmente la production mais de manière raisonnable et qui soit... Pas hors de prix. Cette logique de distribution d'eau potable, c'est capital. On n'avait pas le choix. -Au robinet, il y a de l'eau aujourd'hui ? Elle est potable ? -Oui. Oui. -Vous n'avez pas l'air tout à fait sûre. -Ca dépend ? -L'ARS dit que quand vous avez de l'eau au robinet, il faut la laisser couler un moment parce qu'elle a stagné. Vous imaginez qu'à Mayotte, jamais on fait ça. On n'a pas d'eau... -Vous la consommez tout de suite. -Non, c'est pas ça. On va la garder, elle sera utilisée pour faire les sols, pour aller dans les toilettes. On ne peut pas la laisser couler. -Ca la gâche. -Le fait même de l'énoncer comme ça traduit bien à quel point même dans les bureaux à Mayotte, ils n'ont pas de compréhension de ce qu'on perçoit comme le côté précieux de cette eau. Vous m'aviez demandé : "Quel vin", j'ai dit : "Non, "de l'Hidalgo grand cru", de l'eau du robinet, parce que chez nous, c'est très précieux. C'est un luxe dont on se rend pas compte. -Pour les cultures, vous avez assez d'eau ? -On rentre dans la question des normes, qu'est-ce qu'on autorise pour les agriculteurs ? L'eau de pluie n'était utilisée pour être dans l'agriculture. C'est une question de décret, on est en train de travailler dessus. -Donc il y a des retenues d'eau par les agriculteurs ? -Il faut les autoriser à en construire. Il y avait les prélèvements dans les... Nappes phréatiques. Il y a énormément de travail à faire, mais je pense pour ma part qu'on doit équiper les foyers individuels de citernes pour recueillir l'eau de pluie, Ca demande à chaque fois... Ca a été fait en Nouvelle-Calédonie, ou en Polynésie, pardon, donc ça demande des adaptations. Les territoires insulaires sont en première ligne. A Mayotte, c'est 90 % de la population qui vit sur le littoral, qui est menacée par la montée des eaux. On a des préoccupations qui sont immédiates par rapport au changement climatique, puisqu'une partie des sujets de la pénurie en eau, c'est le changement climatique. Il y a un mix. Je ne dédouane pas les autorités de ne pas avoir fait leur travail sur la production d'eau, mais on a un changement climatique, un changement des routes de cyclones et de pluies dans la région qui fait qu'on a moins de pluies qu'avant. -Il y a la montée des eaux et vous n'avez pas d'eau au robinet. -Mayotte passe de crises en catastrophes, de problèmes en difficultés. -La cuisinière que vous êtes, quand on n'a pas d'eau potable pour les pâtes, le riz, les légumes, comment vous faites ? Vous faites attention ? J'allais dire une bêtise, peut-on faire bouillir l'eau de pluie et cuire des pâtes ? -Certainement pas. Il y a des petites... Pas du tout, et je pourrais pas dire ça, ça prendrait des proportions pas possibles. Mais il y a des pastilles que vous achetez quand vous allez camper pour rendre l'eau potable. -C'est très utilisé ? -Ca coûte une fortune, j'en ramène des pots entiers que je distribue à mes proches. J'en ai à la maison. L'autre problème, c'est que stocker de l'eau, ça devient des nids à moustiques, donc ça propage le palu et la dengue. C'est aussi un problème de santé publique. Il y a rendre potable cette eau, mais on met des produits dedans. Je cuisine à l'eau minérale, dont j'ai obtenu la distribution. Je ne suis pas allée prendre de l'eau, je l'achète, pour que les foyers qui en ont plus besoin que moi puissent la payer. Mais pour moi, c'est très important de réfléchir, et effectivement, vous diminuez au maximum votre consommation en eau. On est le plus économe possible Sur le nettoyage des fruits et légumes, on le fait quand l'eau est courante au robinet, et après, on stocke. C'est beaucoup d'organisation. -Oui, oui. -Tout le monde a fini, on va passer au dessert, c'est le péché mignon. -Brigitte, voici le temps du sucré avec une salade de fruits et toujours cette vanille. Elle est pas de Mayotte mais on voit bien les petits points noirs de vanille. Ca change tout de mettre de la vanille dans la salade ? -Vous avez goûté, vous savez que c'est vrai. Ils rient. -C'était pour vous taquiner sur votre dépendance à la vanille. -Mon obsession. Non mais je ne peux pas ne pas parler des épices, en fait. C'est quelque chose qui relève les plats. J'aime, dans mes salades de fruits, faire des sirops d'épices, donc on prend la vanille, la cardamome, la cannelle, et on laisse infuser dans du sirop de sucre. On le met froid sur les fruits. -C'est très cher, la vanille, en France. -Je sais. -Je suis toujours estomaqué, on achète une gousse, c'est quasiment le prix de la salade. -Ca vient de Mayotte. -Ca vient de loin et c'est d'une telle méticulosité pour produire cette fleur. -C'est précieux, c'est une orchidée qui est compliquée à... D'abord, vous l'aviez expliqué, à fertiliser pour qu'elle se reproduise. La cueillette se fait à la main, elle est séchée à la main, et effectivement, elle fait l'objet aujourd'hui de trafic et de pillage, à Tahiti ou à Madagascar. Et à Mayotte, je me bats pour qu'on permette de... Maintenir cette agriculture, on a un vieillissement, comme ailleurs dans le pays, de notre population d'agriculteurs, pour faire en sorte que cette culture puisse perdurer. Il y a beaucoup de violences sur nos agriculteurs à Mayotte, c'est une récolte qu'on ne peut pas voler. On ne peut la voler que quand elle a été récoltée. Pour moi, ça permet de diversifier leurs productions et d'aller vers l'export, ce repas avec nous. Merci à vous de nous avoir suivis. Rendez-vous la semaine prochaine

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